Quantcast
Channel: Le site officiel du musée des Beaux-Arts de Bordeaux
Viewing all 2983 articles
Browse latest View live

Les expositions du Musée des Beaux-Arts de Bordeaux depuis 1834

$
0
0
Découvrez les affiches, parfois accompagnées de documents (photographies, dossier de présentation, etc.), des expositions organisées par le Musée des Beaux-Arts de Bordeaux* et présentées au musée ou à la Galerie des Beaux-Arts. Ces pages seront régulièrement enrichies, mais si, vous aussi, vous souhaitez partager vos documents personnels pouvant renseigner ces manifestations et participer ainsi à la mémoire du musée, prenez contact avec la documentation.
 
 
 2017
Lien vers la documentation de l'exposition Dorignac. Bordeaux, Musée des Beaux-Arts, 2017
2017
Lien vers la documentation de l'exposition Paris-Bordeaux : Paysages gravés - Bordeaux, Musée des Beaux-Arts, 2017
2016-2017
Lien vers la documentation de l'exposition Odilon Redon - Bordeaux, Musée des Beaux-Arts, 2016-2017
2016
Lien vers la documentation de l'exposition Fantastique ! - Bordeaux, Musée des Beaux-Arts, 2016
2015-2016
Lien vers la documentation de l'exposition Bacchantes modernes - Bordeaux, Musée des Beaux-Arts, 2015-2016
2015
Lien vers la documentation de l'exposition Bordeaux-Italie - Bordeaux, Musée des Beaux-Arts, 2015
2014-2015Lien vers la documentation de l'exposition Bissière - Bordeaux, Musée des Beaux-Arts, 2015
2014
Lien vers la documentation de l'exposition Road Trip, 2014
2014
Lien vers la documentation de l'exposition Fédor Lowenstein, 2014
2014
Lien vers la documentation de l'exposition de 2014 Orientalismes © Documentation musée des Beaux-Arts - Mairie de Bordeaux
2013-2014Lien vers la documentation de l'exposition de 2013-2014 La Maison Goupil © Documentation musée des Beaux-Arts - Mairie de Bordeaux2012-2013Lien vers la documentation de l'exposition de 2012-2013 Montparnasse... © Documentation musée des Beaux-Arts - Mairie de Bordeaux
2012
Lien vers la documentation de l'exposition de 2012 Tobeen © Documentation musée des Beaux-Arts - Mairie de Bordeaux
2012
Lien vers la documentation de l'exposition de 2012 Art victime de la guerre © Documentation musée des Beaux-Arts - Mairie de Bordeaux
2011-2012Lien vers la documentation de l'exposition de 2011-2012 Comme jamais © Documentation musée des Beaux-Arts - Mairie de Bordeaux
2011
Lien vers la documentation de l'exposition de 2011 Poussin Moïse © Documentation musée des Beaux-Arts - Mairie de Bordeaux
2011
Lien vers la documentation de l'exposition de 2011 España© Documentation musée des Beaux-Arts - Mairie de Bordeaux
2010
Lien vers la documentation de l'exposition © Documentation musée des Beaux-Arts - Mairie de Bordeaux
2010
Lien vers la documentation de l'exposition
2010
Lien vers la documentation de l'exposition Nus académiques
2009-2010Lien vers la documentation de l'exposition © Documentation musée des Beaux-Arts - Mairie de Bordeaux2009-2010Lien vers la documentation de l'exposition
2009
Lien vers la documentation de l'exposition
2009
Lien vers la documentation de l'exposition © Documentation musée des Beaux-Arts - Mairie de Bordeaux
2009
Lien vers la documentation de l'exposition
2008-2009Lien vers la documentation de l'exposition Collection particulière, 2008-20092008-2009
2008-2009Lien vers la documentation de l'exposition © Documentation musée des Beaux-Arts - Mairie de Bordeaux
2008
Lien vers la documentation de l'exposition © Documentation Musée des Beaux-Arts - Mairie de Bordeaux
2008
Lien vers la documentation de l'exposition
2007
2007
2007
2007
2006-2007Lien vers la documentation de l'exposition © Documentation Musée des Beaux-Arts - Mairie de Bordeaux2006-2007
2006
2006
Lien vers la documentation de l'exposition du Musée des Beaux-Arts de Bordeaux, Pierre-Albert Bégaud, 2006
2006
2005-20062005-2006
2005
Lien vers la documentation de l'exposition du musée des Beaux-Arts de Bordeaux, Etienne Mariol, 2005
2005
Lien vers la documentation de l'exposition Molinier, 2005
2005
Lien vers la documentation de l'exposition de 2005 Nulla dies sine linea
2004-20052004-2005Lien vers la documentation de l'exposition de 2004-2005 Goûts et saveurs baroques
2004
Lien vers la documentation de l'exposition du musée des Beaux-Arts de Bordeaux Courants d'art contemporain : la collection de la Société Générale
2004
Lien vers l'image de l'affiche de l'exposition de 2004
2004
Lien vers la documentation de l'exposition du musée des Beaux-Arts de Bordeaux, Claude Gilli, 2004
2004
2003
2003
Lien vers la documentation de l'exposition de 2003 : L'Ecole d'Alger
2003
Lien vers l'affiche de l'exposition de 2003 : Paris-Russe
2002
Lien vers la documentation de l'exposition Albert Marquet, 2002
2002
Lien vers la documentation de l'exposition Claude Bellan, 2002
2001
Lien vers la documentation de l'exposition Made in USA
2000
1999Couverture du catalogue de l'exposition Les raisins du silence, 1999
1998
Lien vers l'image de l'affiche de l'exposition de 1998
1997
Lien vers l'image de l'affiche de l'exposition de 1997
1997
Lien vers la documentation de l'exposition Rosa Bonheur © Documentation Musée des Beaux-Arts - Mairie de Bordeaux
1996
Couverture du catalogue de l'exposition La Grèce en révolte, 1996
1995
Lien vers la documentation de l'exposition de 1995, Louis Valtat
1994
Lien vers la liste des peintres de l'armée exposants, 1994
1994
Lien vers la documentation de l'exposition de 1994, La peinture à Naples au XVIIe siècle
1993
Lien vers l'affiche de l'exposition de 1993
1992
1992
1991-1992Lien vers la documentation de l'exposition Trophées de chasse, 1991-1992
1991
Lien vers la documentation de l'exposition Goya : l'oeuvre gravé, Fondation Juan March Le vernissage de l'exposition Goya : l'oeuvre gravé © Documentation Musée des Beaux-Arts - Mairie de Bordeaux
1991
Lien vers la documentation de l'exposition Picasso, une nouvelle dation, 1991 © Documentation musée des Beaux-Arts - Mairie de Bordeaux
1990
Lien vers l'image de l'affiche de l'exposition de 1990
1989
Lien vers la documentation de l'exposition de 1989, Le port des Lumières
1989
Lien vers l'image de l'affiche de l'exposition de 1989
1988
Lien vers l'image de l'affiche de l'exposition de 1988
1987
Lien vers la documentation de l'exposition de 1987, Italie : histoire d'une collection
1986
Lien vers l'image de l'affiche de l'exposition de 1986
1986
Lien vers la documentation de l'exposition de 1986, Bonnard
1985
Lien vers l'image de l'affiche de l'exposition de 1985
1986
Exposition Gaston Schnegg (1866-1953)
1985
Lien vers l'image de l'affiche de l'exposition de 1985
1985
Lien vers la documentation de l'exposition Redon, Bordeaux, 1985
1984
Lien vers l'image de l'affiche de l'exposition de 1984
 
1984
Lien vers la documentation de l'exposition de 1984
1983
Lien vers l'affiche de l'exposition de 1983
1983
Lien vers l'image de l'affiche de l'exposition de 1983
1983
Lien vers la couverture du catalogue de l'exposition Oskar Kokoschka, 1983
1982
Lien vers l'image de l'affiche de l'exposition de 1982
1982
Lien vers l'image de l'affiche de l'exposition de 1982
 
1982
Lien vers l'image de l'affiche de l'exposition de 1982
1981
Lien vers l'image de l'affiche de l'exposition de 1981
1980
Lien vers l'image de l'affiche de l'exposition de 1980
1980
Lien vers l'image de l'affiche de l'exposition de 1980
1979
Lien vers l'image de l'affiche de l'exposition de 1979
1979
Lien vers l'image de l'affiche de l'exposition de 1979
1978
Lien vers l'image de l'affiche de l'exposition de 1978
1978
Lien vers l'image de l'affiche de l'exposition de 1978
1978
Lien vers la documentation de l'exposition de 1978, Max Beckmann : gravures
1977
Lien vers l'image de l'affiche de 1977
1977
Lien vers l'affiche de l'exposition de 1977
1977
Lien vers l'affiche de l'exposition de 1977
1976Lien vers la documentation de l'exposition "Chaval", 1976 © Documentation du Musée des Beaux-Arts. Mairie de Bordeaux
1976
Lien vers la documentation de l'exposition La Comédie française : collections et documents, janvier-mars 1976
1976
Lien vers la documentation de l'exposition de 1976 © Documentation du Musée des Beaux-Arts. Mairie de Bordeaux
1976Lien vers l'affiche de l'exposition de 1976 : Poteries de Bizen
1975
Lien vers la documentation de l'exposition Calder, 1975
1975
Lien vers l'affiche de l'exposition de 1975
1975
Lien vers la documentation de l'exposition "Pompiérisme et peinture équivoque", 1975 © Documentation du Musée des Beaux-Arts. Mairie de Bordeaux
1974
Lien vers le Petit Journal de l'exposition François Bret, 1974
1974
Lien vers l'image de l'affiche de l'exposition de 1974
1974
Lien vers la documentation de l'exposition de 1974, Naissance de l'impressionnisme
1973
Lien vers la documentation de l'exposition Les Cubistes de 1973
1972
Lien vers la documentation de l'exposition Piaubert, 1972
1972
Lien vers la documentation de l'exposition de 1972 "Trésors du Musée de Budapest"
1972
Voir ou télécharger le catalogue de l'exposition "Legs Jean-René Tauzin", 1972 (format PDF) © Documentation musée des Beaux-Arts - Mairie de Bordeaux
1972
Voir ou télécharger le catalogue de l'exposition "Bristol et ses peintres au XIXe siècle", 1972 (format PDF) © Documentation musée des Beaux-Arts - Mairie de Bordeaux
1972
Lien vers l'image de l'affiche de l'exposition de 1972
1971
Lien vers la documentation de l'exposition de 1971 "Surréalisme"
1970
Lien vers l'affiche de l'exposition de 1970
1970
Lien vers la documentation de l'exposition Dufy,  1970
1969
Lien vers le catalogue de l'exposition de 1969, Quatre Américains de Paris
1969
Lien vers la documentation de l'exposition de 1969 "L'Art et la musique"
1969
Lien vers la documentation de l'exposition de 1969 "Manzu"
1968
Lien vers l'image de l'affiche de l'exposition de 1968
1968
Lien vers l'affiche de l'exposition de 1968
1968
Lien vers la couverture du catalogue de l'exposition Tapisseries : Maisons Royales d'Espagne, 1968
1967
Lien vers la couverture du catalogue de l'eposition de 1967, Hommage à André Lhote
1967
Lien vers la couverture du catalogue de l'exposition La peinture française en Suède, 1967
1966
Lien vers l'image de l'affiche de l'exposition de 1966
1965
Lien vers la documentation de l'exposition de 1965 Chefs-d'oeuvre de la peinture française dans les musées de l'Ermitage et de Moscou
1965
Couverture du catalogue de l'exposition de 1965 : Bissière
1965
Lien vers la documentation de l'exposition Chapelain Midy, 1965
1964
Lien vers  la documentation de l'exposition de 1964
1963
Lien vers la documentation de l'exposition © Documentation Musée des Beaux-Arts - Mairie de Bordeaux
1962
Lien vers l'image de l'affiche de 1962
1961
Lien vers la documentation de l'exposition de 1961, Trésors d'art polonais
1960
Lien vers la documentation de l'exposition de 1960 L'europe et la découverte du monde
 
1959
Lien vers la documentation de l'exposition La découverte de la lumière, Bordeaux, 1959
1959
Lien vers la documentation de l'exposition de 1959 "Carle Vernet"
1958
Lien vers la documentation de l'exposition Paris et les ateliers provinciaux au XVIIIe siècle, 1958
1957
Lien vers la documentation de l'exposition "1900 : La Belle Epoque à Bordeaux", 1957 © Documentation du Musée des Beaux-Arts. Mairie de Bordeaux
1957
Lien vers l'affiche de l'exposition de 1957
1956-1957
Lien vers le catalogue de l'exposition de 1956 ou 1957, La gravure norvégienne contemporaine
 
1956
Lien vers la documentaion de l'exposition de 1956, De Tiepolo à Goya
1955
Lien vers la documentation de l'exposition L'Age d'or espagnol, 1955
1954
Lien vers la documentation de l'exposition Flandres, Espagne, Portugal, 1954
1953
Lien vers la documentation de l'exposition de 1953
1953
Lien vers la documentation de l'exposition de 1953, Le Greco
1952-1953Lien vers la documentation de l'expositon de 1952-1953 "Les Chefs-d'oeuvre des musées de Bordeaux"
1952
Lien vers la documentation de l'exposition de 1952, Les Primitifs méditerranéens
1951
Lien vers la documentation de l'exposition de 1951, Goya
1951
Lien vers la documentation de l'exposition de 1951 "Pensées de Pascal : Sur l'Homme et Dieu" illustré par Albert Gleizes
1950
Lien vers la documentation de l'exposition de 1950 "Bristol à Bordeaux" © Documentation Musée des Beaux-Arts - Mairie de Bordeaux
1949
Lien vers la couverture du catalogue de l'exposition © Documentation Musée des Beaux-Arts. Mairie de Bordeaux
1948
1948
Lien vers le catalogue de l'exposition © Documentation Musée des Beaux-Arts. Mairie de Bordeaux
 1948
1948
Lien vers la documentation de l'exposition © Documentation Musée des Beaux-Arts - Mairie de Bordeaux
1948
Lien vers des images de l'exposition (diaporama) Peinture de Marine par Paguenau 16-18 janiver 1948 © Documentation Musée des Beaux-Arts. Mairie de Bordeaux
1947-1948Lien vers la documentation de l'exposition © Documentation Musée des Beaux-Arts. Mairie de Bordeaux
1947
Lien vers la documentation de l'exposition Les Peintres et graveurs belges © Documentation Musée des Beaux-Arts. Mairie de Bordeaux
1947
Lien vers la documentation de l'exposition de 1947 La vie du musée de 1939 à 1947 © Documentation Musée des Beaux-Arts. Mairie de Bordeaux
 
1947
Lien vers la documentation de l'exposition d'art chrétien 1947 © Documentation Musée des Beaux-Arts. Mairie de Bordeaux
1946
Lien vers la documentation de l'exposition Reconstruire, 1946 © Documentation Musée des Beaux-Arts. Mairie de Bordeaux
1946
Lien vers la documentation de l'exposition Bordeaux au temps de la marine en bois, 1946 © Documentation Musée des Beaux-Arts. Mairie de Bordeaux
1946
Lien vers la documentation de l'exposition du musée des Beaux-Arts de Bordeaux, Goya, 1946
1945-1946Image de la couverture du catalogue de l'exposition © Documentation Musée des Beaux-Arts. Mairie de Bordeaux
1945
Lien vers la documentation de l'exposition de 1945 "La Peinture contemporaine en Angleterre" © Documentation Musée des Beaux-Arts-Mairie de Bordeaux
 1943-1944Lien vers la documentation de l'exposition Van Dongen, Bordeaux, 1943-1944
1943
Lien vers la première page du catalogue de l’exposition régionale artisanale, 1943 © Documentation Musée des Beaux-Arts-Mairie de Bordeaux
1939-1944*
1927
Lien vers le catalogue de l’exposition internationale des Beaux-Arts de Bordeaux, 1927 © Documentation Musée des Beaux-Arts-Mairie de Bordeaux
1919
Lien vers la documentation de l'exposition Goya de 1919 à Bordeaux
1834
Lien vers le catalogue de l'exposition de 1834 (PDF - OCR)
*Pendant la Seconde Guerre mondiale le musée fut utilisé, par l'occupant, pour présenter les expositions itinérantes de propagande.

Gabriel ALLEGRAIN, "La Fuite en Egypte"

$
0
0

(Paris, 1679 –  id., 1748)

La Fuite en Egypte

Vers 1716
Huile sur toile. Hauteur. 129 cm. Largeur. 162,2 cm.
Historique : Ancienne collection de l’Académie royale de Peinture et de Sculpture.
Envoi de l’Etat en 1805.

La scène biblique reprend un passage de l’Evangile de saint Matthieu (2, 13-15). Prévenu en songe que le roi Hérode avait ordonné la mort des nouveau-nés d’Israël, Joseph s’enfuit avec la Vierge et l’Enfant Jésus en Egypte où ils restèrent jusqu’à la mort du souverain. Depuis le Moyen Age, nombreux furent les artistes qui reprirent ce thème ou celui du « Repos pendant la fuite en Egypte ». La Vierge est souvent représentée voyageant sur un âne et tenant l’Enfant dans ses bras.
Allegrain ne déroge pas à l’iconographie traditionnelle, avec un ange en adoration, mais il réduit presque la Sainte Famille à de simples voyageurs traversant un paysage. L’œuvre témoigne de l’influence de Poussin et du Lorrain, et présente des références italiennes et antiques : la basilique, les arènes, l’obélisque ou les deux tombeaux de guerriers.
Allegrain accorde toute son importance à cette végétation luxuriante d’où émerge à peine un temple. La lointaine perspective révèle une ville au bord de la mer et une montagne dominée par un édifice. La lumière scande la composition et oppose les deux tombeaux antiques à la Sainte Famille.
Le 26 septembre 1716, Gabriel Allegrain présentait aux académiciens ce tableau qui fut aussi son morceau de réception. Il avait été ordonné par le directeur Antoine Coypel (1661-1722) sur le thème de « la Fuite en Egypte ». Il fut reçu à l’Académie au titre de « peintre de paysage ».
A la demande du comte Elie-Louis Decazes, ministre de l’Intérieur, l’Etat envoya à la cathédrale Saint-André de Bordeaux cette Fuite en Egypte d’Allegrain, ainsi qu’une Vierge à l’Enfant avec sainte Elisabeth et saint Jean alors faussement attribuée à Andrea del Sarto (1486-1530). Considérées comme trop petites pour la vaste nef, les deux peintures furent échangées contre le Christ en croix de Jordaens et intégrèrent les collections du musée de Bordeaux en 1819.
Les œuvres de Gabriel Allegrain sont souvent confondues avec celles de son père Etienne Allegrain (1644-1736), et leur nombre s’avère faible pour apprécier la production de cet artiste peu connu. Mais, le tableau bordelais permet de réunir autour de lui un dessin (Paysage avec Apollon et une nymphe, Paris, musée du Louvre) et quelques paysages (Dijon, Lille et Tours) d’une facture sans prétention.

 

Jean-Marc NATTIER, "Etude pour le portrait de Marie-Josèphe de Saxe"

$
0
0

(Paris, 1685 – Id., 1766)

Etude pour le portrait de Marie-Josèphe de Saxe

Vers 1750
Huile sur toile.
Hauteur 60 cm. Largeur 50 cm.
Historique : Ancienne collection royale. Achat par les musées royaux, 1839. Envoi de l’Etat, 1872.

Charles-François-Paul Le Normant de Tournehem (1684-1751), directeur des Bâtiments du Roi, commanda à Nattier des portraits de la famille royale à partir de 1748. Chaque tableau lui était payé 500 livres. Le portrait de Bordeaux fut commencé en 1750 à Fontainebleau, lors d’un séjour de la cour, mais il ne fut jamais terminé. En revanche, les héritiers de Nattier reçurent l’entier paiement deux ans après la mort du peintre.
Depuis la Révolution, l’identité du modèle avait disparu au profit de celle d’autres princesses - Madame Henriette en 1905, puis Madame Victoire en 1993 – avant de revenir à Marie-Josèphe de Saxe en 1999-2000 (X. Salmon).
Marie-Josèphe Caroline Eléonore Françoise Xavière de Saxe (1731-1767) était la fille d’Auguste III (1696-1763), roi de Pologne et électeur de Saxe, et de Marie-Josèphe d’Autriche (1699-1757), fille aînée de l’empereur Joseph Ier. En 1747, elle épousa le Dauphin Louis (1729-1765) avec qui elle eut huit enfants dont les futurs Louis XVI, Louis XVIII et Charles X.
La jeunesse et la douceur du visage de la Dauphine, traitées dans une gamme peu étendue de couleurs, trahissent ses dix-neuf ans. Seul, le fard rouge des joues rehausse le teint blanc du modèle alors que l’absence de parure et de coiffure complexe souligne la simplicité de l’esquisse.
Fils du portraitiste Marc Nattier, Jean-Marc Nattier commença son apprentissage artistique sous la férule de son parrain Jean-Baptiste Jouvenet (1644-1717). Ainsi placé sous l’influence conjointe de Le Brun (1619-1690) et de Rubens (1577-1640), Nattier commença sa carrière par la peinture d’histoire (Bon Samaritain, 1708, coll. part.) et fut reçu à l’Académie le 29 octobre 1718 avec Persée, assistée par Minerve, pétrifie Phinée et ses compagnon en leur présentant la tête de Méduse (Tours, musée des Beaux-Arts). Cependant, il avait déjà réalisé l’année précédente le portrait du tsar Pierre Ier de Russie  (Munich, musée de la Résidence) en s’inspirant d’Hyacinthe Rigaud (1659-1743). Au cours des années 1720, le peintre mêla le portrait à l’allégorie (Le Comte Maurice de Saxe, 1720, Dresde) en s’inspirant du cycle de Rubens au Luxembourg, commandé par Marie de Médicis. Il lui fallut attendre les années 1735-1740 pour atteindre à un style plus personnel. Face à une concurrence importante de nombreux confrères, Nattier se démarqua en privilégiant une gamme chromatique associant bleu, gris perle, vert et rose, et en pratiquant des touches légères et duveteuses qui donnent du volume. Les contemporains lui ont surtout reconnu ce talent d’embellir ses modèles sans trop s’éloigner de la ressemblance.
Devenu le portraitiste officiel de la famille royale en 1748, Nattier connut un succès considérable auprès de la haute aristocratie mais surtout de la clientèle féminine. Il put y faire face grâce à des séries d’études peintes rapidement d’après le modèle - le tableau de Bordeaux et L’Etude du visage de Madame Infante (1749, Copenhague, Statens Museum for Kunst) - et grâce à un répertoire d’attitudes qu’il soumettait au commanditaire.
Les peintres du Cabinet du Roi (Jeaurat de Bertry, Nivelon ou Prévost) n’hésitaient pas à copier les œuvres du maître ou à les adapter à d’autres portraits. C’est le cas du portrait bordelais qui servit à celui de Versailles (1751) et à celui du château d’Anjony (Cantal) dans lequel sont simplement rajoutés des pendants d’oreilles et une broche de pierreries au décolleté.

 

Marianne LOIR, "Portrait de Gabrielle Emilie Le Tonnelier de Breteuil, Marquise du Châtelet"

$
0
0

(Paris (?), vers 1715 –  ?, après 1769)

Portrait de Gabrielle Emilie Le Tonnelier de Breteuil, Marquise du Châtelet.

Huile sur toile.
Hauteur 118 cm. Largeur 96 cm.
Historique : Envoi de l’Etat, 1803.

La Marquise du Châtelet (Paris, 1706 - Lunéville, 1749), célèbre à son époque pour son érudition et son intelligence, l'est surtout aujourd'hui pour avoir été l'amie de Voltaire qu'elle héberge dix ans à Cirey. Elle est l'auteur d'ouvrages scientifiques Institutions de physique (1740), Discours sur la nature et la propagation du feu (1744), une traduction commentée des Principes mathématiques de Newton (éd. Posthume) et un ouvrage littéraire philosophique, Discours sur le bonheur, (1749).
Ce tableau a bénéficié d'une étude remarquable, écrite par G. Le Coat et A. Eggimaun-Besançon (1986). Grâce à des lectures iconographiques, biographiques et littéraires, les deux auteurs décryptent les circonstances et la date de cette œuvre et lui donnent une valeur emblématique. Par rapport aux autres portraits de la Marquise sans emblème, connus surtout par les gravures où elle est représentée comme une femme d'un certain âge, sans signe de coquetterie (bijoux, fleurs...), les portraits avec emblèmes comme le nôtre (cf. aussi celui de Nattier, 1743, non localisé, ou celui de Largilière, 1740, Colombus Museum of Art), se réfèrent à ses activités scientifiques, compas, globe terrestre, livres mais aussi à sa féminité, œillet, bijoux, toilette sophistiquée, et font ainsi exister l'intellectuelle et la séductrice. L'œillet symbole "de l'amour qui engage la chair" est tenu dans la main gauche, celle du cœur alors que le compas dans la main droite, intellectuelle, est en même temps un symbole mathématique et une idée de contrôle de soi ; faire quelque chose "sans compas" signifie au 18ème siècle "agir à tord et à travers". Les deux emblèmes sont en balance ; l'œillet est mis en évidence, éclairé, au centre de la composition alors que le compas est en bas de l'espace dans l'ombre. Cette femme mûre donne une priorité au sensuel sur l'intellectuel. Les dernières années de sa vie le démontrent avec sa liaison passionnée avec le jeune Saint-Lambert. En 1748, Voltaire écrit à son rival heureux une épître qui peut servir de commentaire au tableau :

"Elle a laissé là son compas,
Et ses calculs et la lunette,
Elle reprend tous ses appâts ;
Porte-lui vite sa toilette
Ces fleurs qui naissent sous tes pas...".

A la même époque, en 1749, elle écrit le Discours sur le bonheur dans lequel elle soutient que l'intellectuel est aussi bien l'apanage des femmes que des hommes, mais que la recherche du bonheur passe par la volupté amoureuse. Pour Gabrielle-Emilie l'étude et l'amour sont complémentaires : une intellectuelle ne cesse pas d'être une femme ; il faut rester en contact avec l'étude dont on ne peut être abandonné ; à cause de la précarité de l'amour, l'étude est bien "celle qui de toutes les passions contribue le plus à notre bonheur".
Marianne Loir en tant que femme "active" ne pouvait qu'adhérer à ce genre de portrait; on reconnaît volontiers son style, proche de celui de Pierre Gobert (1662-1774), dans le caractère statique et les visages toujours souriants. Elle est aussi proche de Nattier avec une "palette privilégiant le gris-perle, le vert la rose et le bleu et ses costumes historiés".

 

Jean II RESTOUT, "La Présentation de Jésus au Temple"

$
0
0

(Rouen, 1692 – Paris, 1768)

La Présentation de Jésus au Temple

Vers 1735
Huile sur toile.
Hauteur 407 cm. Largeur 275 cm.
Historique : Séminaire de Saint-Sulpice à Paris. Envoi de l’Etat, 1805.

Au centre, la Vierge présente l'Enfant Jésus au vieillard Siméon, tandis que derrière elle, saint Joseph tient une cage avec deux colombes pour les offrir en sacrifice. Dans le bas de la composition à droite, la prophétesse Anne de Jérusalem est agenouillée sur les marches. Restout fait converger tous les regards, à l’exception de celui de Joseph, vers l’Enfant légèrement décentré et placé au sommet d’une composition pyramidale. Il équilibre ainsi la perspective fuyant vers la gauche. Mais à cause de la monumentalité du format et de l’emplacement au-dessus de l’autel, le peintre a décentré la représentation principale vers l’avant, pour la rendre plus lisible aux fidèles.
Avec un dessin linéaire et très anguleux qui étire la forme humaine, l’artiste emprunte les attitudes de saint Joseph et du grand prêtre, ainsi que la rampe d’escalier, à des œuvres de son oncle et maître, Jean Jouvenet (1644-1717) : respectivement à La Présentation au Temple (1692, musée des Beaux-arts de Rouen) et à La Purification (musée Condé à Chantilly). Jouvenet influença aussi son élève pour le contraste lumineux, tandis que le coloris clair et la facture rapide rappellent la technique des Vénitiens, notamment celle de son contemporain Giovanni Battista Piazzetta (1683-1754).
Cette peinture fait partie, avec La Naissance de la Vierge (1744, Paris, Saint-Honoré-d’Eylau) et Le Prophète Ezéchiel (1748, Bordeaux, musée des Beaux-Arts), d’une commande réalisée en 1735 pour la chapelle du séminaire de Saint-Sulpice à Paris. Deux ans après la suppression de la Compagnie des prêtres de Saint-Sulpice en 1792, La Présentation fut saisie et déposée aux Petits-Augustins avant d’être mise en réserve au Musée central des arts (le Louvre) en 1797. L’Etat l’envoya au musée de Bordeaux en 1805. L’incendie de l’Hôtel de ville en 1870 a sévèrement endommagé cette œuvre sur la partie gauche qui, malgré un brillant travail de restauration, a perdu de sa lisibilité.
Le tableau bordelais peut s’intituler indifféremment La Présentation de Jésus au Temple, La Purification de la Vierge ou La Chandeleur. Le thème de la Chandeleur ne figure pas dans les Ecritures saintes et seules la Présentation de Jésus au Temple et La Purification de la Vierge en sont issues (Evangile de Luc, 2, 22-40). Jean Restout en réunissant néanmoins dans cette peinture ces trois thèmes offre une interprétation janséniste de cette scène.
Reçu à l’Académie en 1720 avec Alphée et Aréthuse (Rouen, musée des Beaux-Arts), Restout y fit une brillante carrière, devenant directeur en 1760 puis chancelier l’année suivante. Parallèlement à des peintures mythologiques influencées par François Boucher, le peintre consacra l’essentiel de son œuvre à la peinture religieuse dans laquelle il laissa paraître sa religiosité teintée de jansénisme. Il affectionnait les grandes compositions, dans lesquelles il s’éloigna peu à peu du style de son oncle Jouvenet au profit de personnages au naturalisme appuyé et aux drapés animés d’un souffle presque divin.

 

Henri-Horace ROLAND DE LA PORTE, "Nature morte à la vielle"

$
0
0

(Paris, 1724-1793)

Nature morte à la vielle

Vers 1760
Huile sur toile.
Hauteur 80,5 cm. Largeur 101 cm.
Historique : Ancienne collection  Belay, 1872 ; ancienne collection Gardère ; legs  de Théodore Gardère, 1903.

Sur une table en bois, apparaissent un instrument de musique ancien (la vielle à roue), mais aussi un bocal de pêches au sirop, une partition, deux dés et un cornet placés devant une boite en laque de Chine sur laquelle repose une assiette de raisins et de poires. Dans la pénombre de l’arrière-plan, une étagère murale porte des livres et des étoffes.
Les premières natures mortes aux instruments de musique apparurent dès la seconde moitié du 15e siècle, sur des trompe-l’œil en intarsia ornant les portes des studioli d’Udine (vers 1472), de Mantoue (1505) ou de Monte Oliveto Maggeiore (1503-1505). Elles connurent dès lors une diffusion européenne.
La représentation d’instruments musicaux a longtemps concerné le domaine religieux avec, en particulier, les concerts d’anges vénérant la Nativité, une Madone, ou sainte Cécile. Elle gagna ensuite les cours d’Italie du Nord, dans des scènes de concert individuel ou collectif  (Titien, Concert champêtre, 1510-1511, Paris, Louvre) avant de s’étendre au reste de l’Europe au 17ème siècle. Symbole de l’Ouïe, l’instrument de musique accompagnait certaines allégories ou devenait le symbole des vanités de ce monde.
La nature morte bordelaise  célèbre les plaisirs de la vie : le goût du jeu (le cornet et les dés),  les délices de la table (le bocal de pêches, les raisins et les poires) et la musique (la vielle). Mais derrière cette évidence, se dissimulent des allusions philosophiques sur la brièveté de la vie et la limite du savoir avec la partition froissée.
Sur cette dernière, la notation reviendrait peut-être au compositeur Jean-Marie Lemaire qui fut poignardé à son domicile parisien le 23 octobre 1764. D’après Olivier Le Bihan, cette éventuelle attribution donne à la nature morte la dimension symbolique d’un memento mori (« Souviens toi que tu mourras »).
Elève de Jean-Baptiste Oudry (1686-1755), Roland de La Porte fut reçu à l’Académie le 26 novembre 1763 avec Vase de lapis, sphère et musette (1763, Paris, musée du Louvre). S’il étendit son talent au portrait, Roland de La Porte assit sa réputation sur ses natures mortes qu’il signait rarement. Il est décrit souvent comme un « imitateur » de Chardin, voire sa « victime » selon Diderot (Salon de 1765). L’influence du maître est certes indéniable mais la dimension décorative l’emporte sur une méditation. Tout comme Jeaurat de Bertry (1728-v. 1796), Roland de La Porte ne faisait que reprendre un style et une esthétique qui lui assurait faveur auprès des commanditaires (marquis de Marigny) et des collectionneurs (La Live de Jully).
Avant tout, cette nature morte est caractéristique du soin que portait l’artiste à la répartition de la lumière et de la couleur. Son traitement illusionniste de la profondeur et sa précision dans le rendu des objets le démarquent en fait de Chardin. En revanche, il se rapproche du maître par la dimension intimiste de l’image et par le rendu des matières, jouant sur la rugosité ou le poli, la brillance ou la matité, la simplicité ou la préciosité des surfaces et des matières, à l’exemple de la vielle à roue.

 

Jean-Faur COURREGE, "Vénus pleurant la mort d’Adonis"

$
0
0

(Paris, 1730 - Bordeaux, 1806)

Vénus pleurant la mort d’Adonis

Avant 1753
Huile sur toile. Hauteur. 130 cm. Largeur. 196 cm.
Historique : Salon de l’Académie de Saint-Luc, 1753, n° 213 ; ancienne collection Carraci, Bologne ; anciennes collections Ferrier, Dodd puis Cote, Montréal ; ancienne collection Keller, Westmount ; achat de la Ville avec la participation du F.R.A.M, 1991.

Sous le regard d’un chien caché dans l’ombre, sur la droite du tableau, Vénus découvre avec effroi le corps étendu et inanimé de son amant Adonis au cœur de la forêt. Aux pieds de celui-ci, gisent sa lance et son carquois. En arrière-plan, se tient le char de la déesse où l’attendent deux amours.
Le poète latin Ovide (43 av. J.-C.-17 ap. J.-C) raconte le mythe de Vénus et d’Adonis dans le Livre X de ses Métamorphoses. L’histoire de cet amour entre la déesse et un mortel se conclut tragiquement avec la mort accidentelle d’Adonis, tué par un sanglier qu’il avait blessé avec son épieu. Du sang d’Adonis, Vénus fit éclore une fleur : l’anémone.
Cet amour mythique donna lieu à des œuvres littéraires, en particulier L’Adone du Cavalier Marin (1569-1625), et à de nombreuses représentations du 16ème au 18ème siècle, tant en Italie (Jules Romain, Titien, Véronèse, Luca Cambiaso, L’Albane), en Flandres (Rubens et Van Thulden), qu’en Hollande (Bol, Holsteyn) et en France (La Hyre, Monier, Poussin, Vouet). Le Musée de Bordeaux possède d’ailleurs un Vénus et Adonis (vers 1760) du peintre allemand Zoffany. Ces artistes s’attachaient souvent à peindre le repos entre les deux amants ou bien Vénus empêchant Adonis de partir à la chasse, mais plus rarement la découverte du cadavre de l’amant. C’est ce thème que Courrège représente en suivant fidèlement le texte antique. Ainsi, Vénus apparaît désespérée, sautant de son char, sa robe relevée au-dessus des genoux pour chasser, mais aussi déchirée en signe de deuil. Elle contemple le cadavre d’Adonis allongé à ses pieds, en compagnie d’un amour qui pleure. Courrège revient ainsi au mythe ancestral d’Eros et Thanatos.
Le peintre place ses personnages au premier plan de sa composition en partie fermée par la végétation à droite, le char de la déesse et les nuages sur la gauche. La disposition de cette figuration rappelle implicitement une lamentation de la Vierge (Vénus) sur le Christ mort (Adonis), ou un saint Sébastien découvert par Irène. Cependant, Courrège s’inspire peut-être d’une gravure de Louis-Simon Lempereur d’après un tableau du Guerchin (1591-1666), et surement d’une estampe de Michel-Guillaume Aubert d’après François Boucher (1703-1770). Cependant, le peintre atténue le statisme des figures grâce à des drapés gonflés par le vent et par l’utilisation de plusieurs obliques : le corps d’Adonis, la lance, les bras de la déesse et de l’amour. La lumière accentue le drame en se focalisant sur le cadavre et révèle une gamme chromatique raffinée qui se détache sur un fond sombre.
On sait peu de choses sur la vie et la carrière de Jean Faur (ou Fort) Courrège qui signait aussi Courrèges, Corrège, et Corège. Il fut reçu à l’Académie de Saint-Luc le 5 mai 1753, avant de participer à quatre Salons (1753, 1756, 1762 et 1764) et d’y être nommé « adjoint à professeur » dix ans plus tard.
Il quitta définitivement Paris en 1771, auréolé du titre de « professeur à l’Académie de Saint-Luc », pour s’installer à Bordeaux où il fut intégré à la nouvelle Académie au mois d’août. A ce titre, il exposa aux Salons de 1771, 1774, 1776 et 1782 certaines œuvres déjà présentées à Paris. Avec ses collègues bordelais, il assura la charge de professeur pour l’étude d’après le modèle vivant. En 1792, il signa Un baptême du Christ destiné à la chapelle des Dominicains (actuelle église Notre-Dame). Cependant, sa carrière bordelaise ne connut pas le succès espéré.
La plupart des tableaux de Jean Courrège présentent une filiation avec Jean Restout (1692-1768), comme en témoignent L’Adoration du Sacré Cœur (1749, Tours, musée des Beaux-Arts). Cette Vénus pleurant la mort d’Adonis mais aussi Le Christ et la Samaritaineégalement présents dans nos collections sont une illustration de la période « baroque » de l’artiste.

 

Jean-Joseph TAILLASSON, "Le Tombeau d’Elisée"

$
0
0

(Bordeaux, 1745 – Paris, 1809)

Le Tombeau d’Elisée

Avant 1774
Huile sur toile. Hauteur. 131 cm. Largeur. 159 cm.
Historique : Ancienne collection de l’Académie de Peinture, de Sculpture et d’Architecture de Bordeaux, 1774 ; ancienne collection de l’Ecole de dessin de Bordeaux, 1793 ; entrée au Musée en 1801.

Selon le Second Livre des Rois  (XIII ; 20-22), des Juifs procédaient à l’enterrement de l’un des leurs lorsqu’ils virent une troupe de Moabites qui envahissaient alors Israël. Dans la précipitation, ils jetèrent le cadavre dans le sépulcre d’Elisée enterré l’année précédente. Au contact des os du prophète, l’homme ressuscita et se leva. Flavius Josèphe (v. 37-100 ap J.C) donna une version différente dans ses Antiquités judaïques (livre IX, chap. VIII, § 6). Il évoque des brigands jetant le cadavre de leur victime dans le tombeau du prophète et provoquant involontairement le miracle. C’est d’après cette version que Taillasson choisit le sujet de son tableau.
La composition pyramidale et peu profonde de l’œuvre est accentuée par un éclairage qui détache la gestuelle des personnages sur un fond sombre et qui fait contraster celui-ci avec la vivacité du manteau bleu et du drapé rouge. Le personnage central déploie ses bras vers le ciel tandis que son visage exprime la surprise et la frayeur. A côté de lui, son comparse, en appui sur son bras gauche, exprime le même désarroi et la même stupeur tandis qu’un troisième fuit. Le ressuscité est à peine visible. Avec un effet théâtral, le spectateur ne lui distingue que les pieds encore raides et les deux mains aux doigts écartés, qui se dressent hors de la tombe.
La critique remarqua la qualité  de l’exécution ainsi que l’étude des expressions qui rappelle les conférences de Charles Le Brun au siècle précédent et dont témoigne une étude préparatoire de la tête du principal brigand (Bordeaux, musée des Beaux-Arts).
Issu d’une famille de négociants bordelais, Jean-Joseph Taillasson ne commença son apprentissage artistique qu’à 16 ans, auprès du graveur Lavau. Dans l’atelier de celui-ci, il fit connaissance de Pierre Lacour avec qui il entretint une amitié toute sa vie. Mais, devant les faibles possibilités de la capitale régionale, le jeune peintre préféra résider à Paris en 1764. Il entra alors dans l’école privée que dirigeait l’académicien Joseph-Marie Vien (1716-1809). Deux ans plus tard, il s’inscrivit à l’école de l’Académie royale de Peinture et de Sculpture et suivit les cours destinés aux futurs peintres d’Histoire. Ces premières toiles connues datent de cette période.
Sur les conseils de son maître Joseph-Marie Vien et de son parent Lemoyne, Taillasson entama en 1767 le parcours qui l’amena à concourir au Grand Prix de peinture. Malgré plusieurs tentatives infructueuses, à l’instar de son confrère Jacques Louis David (1748-1825), il se fit remarquer du public et des amateurs pour ses têtes d’expression.
Après des échecs répétés au Grand Prix de l’Académie royale de Peinture et de Sculpture, Taillasson décida de partir pour Rome à ses frais avec l’accord de sa famille. En octobre 1772, il voyagea en compagnie de son ami Pierre Lacour (1745-1814). Le Contrôleur général des Finances Terray accorda à Taillasson l’autorisation de loger au palais Mancini, siège de l’Académie de France à Rome, en avril 1774. Cette même année, l’artiste se fit agréé à l’Académie de Peinture, de Sculpture et d’Architecture de Bordeaux en envoyant depuis Rome le Tombeau d’Elisée et Mars terrassé par Pallas et secouru par Vénus (non localisé) ; il exposa aussi au Salon qui se tenait dans l’hôtel de la Bourse à Bordeaux.
 De retour à Paris, il négligea Bordeaux, n’étant jamais reçu en personne par l’Académie de Bordeaux, « attendu qu’il se tint constamment éloigné de cette ville ». Sa carrière alterna peintures d’histoire antique (Mézence à qui on apporte le corps de Lausus, 1780, dessin préparatoire, Nancy, musée des Beaux-Arts) et portraits (Le Comte de Saint-Germain, 1777, Versailles).
Agréé à l’Académie en 1782 avec la Naissance de Louis XIII (Pau, Musée national du château), il fut reçu deux ans plus tard avec Ulysse et Néoptolème enlevant à Philoctète les flèches d’Hercule (Bordeaux, musée des Beaux-Arts). De sa réception jusqu’en 1806, le peintre exposa régulièrement ses peintures au Salon ; l’envoi le plus important se produisit en 1785 avec une douzaine de peintures et de dessins. La critique soulignait régulièrement les gestes trop appuyés, les couleurs sombres et le dessin un peu sec.
S’engageant résolument dans la Révolution, Taillasson connut ses premières commandes officielles (Rodogune et Sapho, 1791) et, grâce au peintre Jacques-Louis David, obtint un logement au Louvre en 1792. Les « Prix d’encouragement », instaurés en 1792, récompensèrent notamment Pauline, femme de Sénèque, ne voulant pas survivre à son mari, s’était fait ouvrir les veines, 1792-1793, Paris, musée du Louvre) et Héro et Léandre (1798, musée des Beaux-Arts de Bordeaux).
L’œuvre de Taillasson participe du courant néo-classique bien que le Tombeau d’Elisée témoigne de quelques accents baroques. Le peintre s’inspire, pour ce qui est de la composition, de Nicolas Poussin (1594-1665) dont il était un fervent admirateur, mais aussi de ses contemporains David et Peyron.

 


Jean-Baptiste Greuze "L'Inconsolable"

$
0
0

(Tournus, 1725 – Paris, 1805)

L’Inconsolable

Huile sur toile. Hauteur : 45,7 cm. Largeur : 37,5 cm.
Historique : Collection du comte de Vaudreuil, vendue le 26 novembre 1787 (lot n° 100). Galerie Seligman, Paris. Collection Philip Lathrope Cable et Martha Kelly Cable. Collection privée, New York. Don de la Société des amis des musées de Bordeaux , 2014.

La plus ancienne description de cette oeuvre se trouve dans le catalogue de vente de la collection du comte de Vaudreuil, le 26 novembre 1787 (lot n° 100). Nous pouvons y lire, sous l’expertise du marchand parisien Jean-Baptiste Pierre Le Brun (1748-1813), garde du cabinet du comte d’Artois :
Une jeune fille vêtue de deuil, & dans la plus grande douleur ; sa tête penchée est appuyée auprès d’une urne. La beauté des formes & la vérité du ton, distinguent toujours les ouvrages variés & inappréciables de cet Artiste.
Cette peinture réapparut à la galerie Seligman à Paris avant d’intégrer la collection Philip Lathrope Cable et Martha Kelly Cable, puis une collection privée new-yorkaise. Elle passa en vente chez Sotheby’s New York le 18 mai 2006 (lot n° 221).
L’intérêt de cette acquisition réside d’abord dans sa provenance prestigieuse. Joseph- Hyacinthe François-de-Paule de Rigaud (1740-1817), comte de Vaudreuil, assumait entre autres les charges de lieutenant général, de grand fauconnier de France et de gouverneur du Louvre. Sa réputation d’amateur distingué et de protecteur des Beaux-Arts reposait en partie sur une importante collection de peintures. Dans le catalogue de la vente de 1784, écrit en collaboration avec Vaudreuil, Lebrun écrivait en introduction : On n’aura pas vu depuis la vente du cabinet de M. de Gaignat, une collection qui offre tant de beaux tableaux dans un aussi petit nombre. Le goût le plus sûr et le plus difficile semble avoir présidé ce choix, et le hasard s’est plu à le favoriser, en lui fournissant les productions les plus précieuses et les plus rares des maîtres les plus habiles. Il est peu de personnes qui n’eussent envié à M. le comte de Vaudreuil la jouissance de son cabinet ; il n’est point d’amateur qui puisse se flatter de trouver souvent les mêmes occasions d’exercer ses connoissances (LEBRUN, Jean-Baptiste Pierre, Catalogue raisonné d’une très-belle collection de tableaux des écoles d’Italie, de Flandre et de Hollande, qui composoient le Cabinet de M. le comte de Vaudreuil, grand-fauconnier de France, Par J. B. P. Le Brun, peintre, la vente s’en fera le mercredi 24 novembre 1784, & jours suivans, de relevée, rue Plâtrière, hôtel de Bullion, Paris, de Prault, 1784, p. 2).
La qualité de cette collection a suscité une longue description par Luc-Vincent Thiéry de Sainte-Colombe (1734- ?) dans son Guide des amateurs et des étrangers voyageurs à Paris (Paris, Hardouin et Gattey, 1787, t. 2, pp. 542-549). L’auteur signale dans le salon, entre la cheminée de marbre blanc et une fenêtre, Deux têtespar Greuze accrochées à côté de deux Sainte Famille de Stella et Baugin, et deux paysages de Ruysdael et Boucher ; et, entre la glace et la porte de  la chambre à coucher, deux Têtes par M. Greuze, à côté d’un Chimiste de Bilcoq et d’une Fête villageoise de Le Prince.
Les confortables revenus de Vaudreuil ne compensèrent pas ses dépenses somptuaires. En 1787, le comte avait une dette évaluée à plus de deux millions de livres pour lesquelles le comte d’Artois s’était engagé. Il se résolut donc à vendre notamment sa collection de peintures en trois fois : en 1784 pour les écoles flamandes, hollandaises et italiennes, en 1787 pour l’école française et quelques tableaux hollandais et italiens, le mobilier et les objets d’art, et en 1796.
La vente de 1787 proposait de Greuze deux dessins (Accordée de Village et Le Paralytique servi par ses enfants, n° 162) signés et offerts à Vaudreuil par l’artiste, et cinq tableaux dont quatre figures en buste, les quatre Têtes signalées par Thiery dans son guide : Une jeune fille, vue en buste, la tête penchée et appuyée sur un oreiller (n° 97, 1399#19, Quenet), Le Buste d’un jeune garçon, vu de trois (n° 98, 1281#, Hamon), Une jeune bacchante, vue en buste (n° 99, 760#, Cornillon) et Une jeune fille vêtue de deuil, et dans la plus grande douleur ; sa tête penchée est appuyée auprès d’une urne.
Greuze avait déjà abordé le thème de la veuve inconsolable dans un tableau peint vers 1762-1763 et conservé à la Wallace collection à Londres. Le modèle y est représenté de pied, assis dans un fauteuil au pied du buste du défunt. Le peintre reprit ce thème pour la peinture parisienne vers 1780, date proposée par Madame Yuriko Jakall, conservateur à la National Gallery of Art de Washington, avec un cadrage serré sur le buste d’une jeune fille. Le modèle aux joues rebondies et à la chevelure châtain clair rappelle l’héroïne de la Prière du matin (vers 1775-1780) conservée au musée Fabre à Montpellier. Le peintre a produit une série de têtes d’expression féminines, sous les traits de jeunes femmes larmoyantes, vues en buste, dans la veine de ses scènes empreintes d’un sentimentalisme souvent moralisateur. Deux exemples proches de l’œuvre parisienne se trouvent, l’un au Metropolitan Museum of Art de New York (Tête de jeune femme, vers 1780, 0,41 x 0,324 m, 67.187.72), l’autre sur le marché de l’art en 2009 (Buste d’une jeune fille appelée Virginie, huile sur toile, 45,7 x 37,4 cm, Sotheby’s New York, 30 janvier 2009, lot n° 208).
L’originalité et l’intérêt de L’Inconsolable, dont une étude à la sanguine et à la pierre noire est conservée dans une collection particulière, résident dans le traitement néoclassique de la chemise blanche, ourlée d’une broderie d’or, et de l’urne ornée de putti.
Madame Yuriko Jakall a souligné la notoriété de L’Inconsolable avec une gravure d’Antoine Achille Bourgeois de La Richardière (1777-1830), une Arthémise d’après Greuze par Jean-Baptiste-Jacques Augustin (1759-1832) et trois copies passées en ventes publiques : Paris, Drouot, 14 juin 1993, lot 24, huile sur toile 47,5 x 39,5 cm ; Christie’s South Kensington, 29 octobre 1997, lot n° 107, huile sur toile, 47 x 38,1 cm ; Bonhams San Francisco, 23 novembre 2008, lot n° 6022, 45,7 x 37,5 cm.
Ces différentes raisons justifient l’acquisition de L’Inconsolable de Greuze qui complète le fonds du XVIIIe siècle français, riche d'environ cent cinquante œuvres, et s’ajoute à la Jeune fille effrayée par l’oragede l’ancienne collection Tauzin.
 
Marc Favreau, conservateur en chef au musée des Beaux-Arts de Bordeaux

Johann Friedrich August TISCHBEIN, "Frédérique Louise Wilhelmine, Princesse d’Orange-Nassau"

$
0
0

(Maastricht, 1750 – Heidelberg, 1812)

Frédérique Louise Wilhelmine, Princesse d’Orange-Nassau

1788
Huile sur toile.
Hauteur 210 cm. Largeur 165 cm.
Historique : Achat de la Ville, 1970.      

Représentée en pied, la princesse est vêtue d’une robe à l’anglaise gris-vert dont la large ceinture mauve rappelle la couleur des escarpins et du chapeau. Elle tient à la main droite une partition de musique tout en s’appuyant de la gauche au dossier d’un fauteuil placé devant un pianoforte. Derrière elle, une large baie ouvre sur un jardin paysagé orné d’une statue.
C’est en 1788 que le stathouder de Hollande, Guillaume V (1748-1806), invita pour la troisième fois Tischbein à se rendre à La Haye afin de peindre les portraits de sa famille (Amsterdam, Rijksmuseum). Cette commande intervenait quelques mois après la défaite des républicains bataves et le rétablissement de Guillaume V par l’armée de son beau-frère, le roi Frédéric-Guillaume II de Prusse. Ce dernier se rendit alors dans la capitale hollandaise afin de conclure des alliances matrimoniales, notamment l’union du fils d’un général prussien, Charles Georges Auguste de Brunswick-Wolfenbütell (1766-1806) avec la fille de Guillaume V, Frédérique Louise Wilhelmine (1770-1819). Ce fut sans doute à cette occasion que Tischbein réalisa ce portrait où il s’applique à rendre les plus infimes détails. Le couvercle du pianoforte laisse ainsi apparaître le nom du facteur (Gabriel Guillebard, La Haye 1788) tandis que les partitions de musique révèlent quelques titres : Sonates / au pianoforte : pour la princesse / Louise / par Collizzi (musicien à la Chapelle de Guillaume V d’Orange et professeur de chant de la princesse).
Le portrait d’apparat, qui connut son apogée au cours du Grand Siècle, gagna au siècle suivant la noblesse de robe et la grande bourgeoisie. Ce type de portrait exclut toute spontanéité du modèle et participe à l’expression de la puissance et au renom du personnage central. Les vêtements et les objets permettent d’identifier le modèle socialement (une princesse) et humainement (son goût pour la musique et les arts). L’effet de richesse est renforcé par les textures et les matières luxueuses associées aux éléments du décor. Ici, l’artiste met l’accent sur la précieuse ornementation du large chapeau de la princesse : la soie rayée blanche et mauve qui le recouvre est rehaussée d’une grande écharpe blanche et de deux plumes d’autruche.
Membre d’une importante dynastie de peintres allemands, Tischbein fut l’élève de son père Johann Valentin (1715-1768) puis de son oncle Johann Heinrich Tischbein le Vieux (1722-1789) qui lui enseigna notamment l’art du portrait. Il se mit au service du Prince évêque von Waldeck, à Arolsen, qui l’envoya compléter ses études à Paris entre 1772 et 1777. Puis il voyagea à Rome où il rencontra Anton Raphaël Mengs (1728-1779), et à Naples entre 1777 et 1779, avant de retrouver le prince. Il quitta ce dernier pour la cour de Léopold III d’Anhalt-Dessau en 1795. Il assuma la direction de l’Académie de Leipzig à partir de 1800 et des commandes à Saint-Pétersbourg entre 1806 et 1809. Dès les années 1780, Tischbein abandonna son style rocaille au profit d’un « néoclassicisme sentimental » ou d’un « proto-romantisme naturaliste » sous l’influence des Anglais Thomas Gainsborough (1727-1788) et George Romney (1734-1802), et des Français Jean-Baptiste Greuze et Elisabeth Vigée-Lebrun (1755-1842). Tischbein privilégia alors le charme naturel au rang social, tant dans ce portrait bordelais que, par exemple, dans celui de Frédérique Sophie Willhelmine de Prusse (1789, La Haye, Mauritshuis) ou LePortrait de Nicolas Châtelain dans un jardin (1791, Munich, Neue Pinakothek) qui conforta la réputation internationale de son auteur. Il s’imposa surtout dans les portraits masculins, comme le remarquèrent les critiques contemporains, mais il ne délaissa jamais l’élégance et les objets qui seyaient à l’aristocratie (Portrait de la famille Saltykov, 1782, Saint-Pétersbourg, Ermitage). Cependant, son approche du modèle n’est pas tant psychologique que sentimentale, témoignant du préromantisme dans la peinture allemande.

Thomas LAWRENCE, "Portrait de John Hunter"

$
0
0

(Bristol, 1769 – Londres, 1830)

Portrait de John Hunter

1789-1790
Huile sur toile.
Hauteur 244 cm. Largeur 148 cm.
Historique : Ancienne collection de Mme Buller Epsom, 1936. Ancienne collection M. Stanhope Shelton, 1956. Ancienne collection I.B. Atkins, 1988. Achat de la Ville, avec la participation du F.RA.M. Aquitaine, 1992.

John Hunter est représenté en pied, se détachant devant un ciel menaçant. Il est vêtu d’une tenue d’extérieur composée d’un pantalon marron et de bas de soie blanche, d’une chemise blanche et d’un gilet brun sous une redingote marron. Il porte des chaussures à boucles d’argent, s’appuie de sa main droite sur une canne et tient de sa main gauche gantée son chapeau et l’autre gant. Sa tête est coiffée d’une perruque dont le catogan est retenu par un ruban bleu.
Le visage tourné vers la gauche, il regarde vers le lointain tandis que son chien, assis à ses pieds, lève les yeux vers lui. A l’arrière-plan, se distinguent le château de More Hall (ou Gobions, Hertfordshire) et un laboureur travaillant la terre avec sa charrue et une paire de bœuf.
Ayant fait fortune à Bombay, le négociant John Hunter (vers 1724-1802) acheta le domaine de More Hall en 1777. Il s’intéressa à la mise en valeur de ses terres par le labourage et le pâturage. Cette acquisition lui octroya le titre d’écuyer de Gobions et l’amena à assumer la charge de haut sheriff de Hertfordshire en 1780-1781, avant de siéger à la Chambre des Communes. Il devint l’un des directeurs de la Compagnie des Indes orientales à partir de 1788, puis député-président au cours des années 1790. La loi de 1784 sépare clairement l’action du gouvernement anglais et l’activité commerciale : la Compagnie conservait le contrôle économique sur les Indes orientales assurant ainsi son développement, mais la Couronne gardait gouvernance des territoires.
La verticalité du modèle, renforcée par celles de la canne et des pattes du chien, domine la composition qui trouve sa profondeur dans la succession d’arrière-plans, plus ou moins horizontaux. Les tons bruns, ocre et verts dominants sont rehaussés par le bleu du ruban et le blanc des vêtements, par l’éclat des rayons du soleil éclairant la demeure et se reflétant sur les eaux d’un étang.
L’artiste répéta cette composition tout au long de sa carrière. Elle rappelle les portraits anglais d’Anton Van Dyck et ceux de Joshua Reynolds (1723-1792) (Portrait de Sir Walter Calverley Blackett, 1759-1762, Wallington Hall) et témoigne d’une facilité technique indispensable pour répondre aux nombreuses commandes.
A l’âge de vingt ans, Thomas Lawrence présenta à la Royal Academy de Londres le portrait de Lady Cremorne (1789, Londres, Tate Gallery). Cette peinture entraîna la commande du portrait de la Reine Charlotte (1789, Londres, National Gallery) et permit à l’artiste de conforter sa réputation de portraitiste auprès de  l’aristocratie. Client fidèle, John Hunter commanda à Lawrence, entre 1789 et 1790, quatre portraits dont le seul localisé se trouve au musée de Bordeaux.
Le peintre reprit sa manière de présenter son modèle, debout devant un ciel menaçant, dans son portrait de John, lord Mountstuart (1794, coll. part.).

Pierre LACOUR (Père), Vue d’une partie du port et des quais de Bordeaux dits des Chartrons et de Bacalan

$
0
0

Bordeaux, 17 avril 1745 - Bordeaux, 28 janvier 1814

Vue d’une partie du port et des quais de Bordeaux dits des Chartrons et de Bacalan

1804-1806
Huile sur toile
Hauteur 207 cm. Largeur 340 cm
Achat, 1872.

Pour reprendre les termes de Johanna Schopenhauer, il règne en bord de Garonne une «joyeuse cohue [...] du matin à la tombée de la nuit». Lors de leur arrivée sur Bordeaux, le 5 février 1804, c'est-à-dire l'année même où Pierre Lacour entreprend sa vue du port de Bordeaux, Johanna Schopenhauer et son fils découvrent émerveillés «l'une des plus grandes cités de France». «Nulle part on ne trouve sans doute le grouillement de la grande ville autant associé à tous les charmes de la nature champêtre.» En cette fin d'après-midi printanière, où le «soleil brûle d'une chaleur tout à fait impitoyable», l'agitation est à son comble sur le quai des Chartrons. D'aucuns peuvent même imaginer le bruit assourdissant qui y règne, avec les cris des charretiers, des bateliers, des fardiers, mêlés aux mugissements et hennissements des bêtes de somme sur la cale.
Et pourtant, il n'y a pas, à bien regarder, une activité débordante. L'œil du spectateur se trouve immédiatement attiré par l'imposante façade du quai. Pourtant, elle est très composite, avec ces immeubles de hauteurs et de proportions différentes, dominée par la masse imposante de l'hôtel Fenwick.
 

Détail : L'Hôtel FenwickCelui-ci fut bâti, à la fin du XVIIIe siècle, par l'architecte Dufart, pour le consul des États-Unis Joseph Fenwick. L'immeuble compte huit travées en façade, sur le Pavé des Chartrons mais nous n'en apercevons que sept en raison du point de vue choisi par Lacour. Au rez-de-chaussée, deux tilleuls, sous le feuillage desquels des promeneurs cherchent un peu d'ombre, encadrent l'entrée principale en plein cintre. Au premier étage, afin de conserver un peu de fraîcheur, les volets des baies ont été fermés. Sur le balcon, des enfants se dirigent en courant vers leurs parents, accoudés à la balustrade. Plus haut, l'étage dévolu aux domestiques se protège également des ardeurs du soleil. L'ombre portée d'un volet laissé ouvert vient se projeter sur le mur ensoleillé. Au-dessus de la toiture, se détachent les deux petits lanternons qui servaient d'observatoires au propriétaire des lieux, lui permettant de jouir agréablement à la fois de la vue et de l'activité portuaire. Le récent nettoyage du tableau a mis au jour les traînées de fumée qui s'échappent de l'une des cheminées. Leur présence nous laisserait très justement penser que Lacour a choisi de peindre son tableau en fin d'après-midi, c'est-à-dire au moment où le soleil commence à décliner et que le personnel domestique prépare le souper...

Détail : Devant le Café des Américains © Musée des Beaux-Arts - BordeauxLe long du Pavé des Chartrons, l'immeuble Fenwick présente quatre travées. Au rez-de-chaussée, quatre portes monumentales donnent directement accès sur le quai. Plus loin, se dressent, le long de la courbe du fleuve, les maisons des négociants étrangers dont les balcons sont également occupés par leurs propriétaires. Chaque bâtiment comporte, en règle générale, un rez-de-chaussée réservé aux affaires et, en arrière, des chais et des entrepôts. Les étages supérieurs étaient, quant à eux, réservés au maître des lieux et à sa famille. En étudiant de manière plus approfondie la presse quotidienne de l'époque, il est intéressant de constater que la plupart des ressortissants américains est installée à proximité du consulat. Ainsi la maison Gray Et Hoskins se trouve juste à côté de celle de Fenwick. Plus loin, c'est-à-dire à quelques mètres de là, se tient le Café des Américains, dont on aperçoit, au-dessus de l'entrée, le nom en lettres jaunes sur fond rouge. Il s'agissait en fait d'un fonds de commerce appartenant à un limonadier, qui fut d'ailleurs mis en vente, le 1er brumaire an XIII (23 octobre 1804). Enfin le bureau de la loterie est signalé dans la presse sous l'adresse : « sixième maison après M. Fenwick ».

Détail : Fontaine de la rue Raze © Musée des Beaux-Arts - BordeauxEn cette fin de journée, se pressent à la fois les charretiers et leurs attelages chargés de pierre, mais aussi les carrosses et les cabriolets, dont l'un des cochers tente de calmer sa monture. Des bornes protègent les promeneurs de tout danger lié au trafic. Plus loin, le spectateur peut distinguer les deux maisons jumelles, surnommées « maisons hollandaises », dont on aperçoit les pignons, derrière le bâtiment d'octroi. Enfin, la fontaine de forme pyramidale de la rue Raze, qui fournissait à l'époque une grande partie de l'eau potable au faubourg, reste encore visible au loin, à proximité d'un immeuble dont l'une des cheminées fonctionne à plein régime. Au-delà du quai des Chartrons, s'étend le quai de Bacalan, peuplé essentiellement de journaliers, de bateliers et de tonneliers, dont il est difficile de détailler les immeubles en façade.
En raison de l'étendue des quais épousant la courbe du fleuve, Lacour a concentré l'essentiel de son attention sur un périmètre avoisinant l'hôtel Fenwick. À gauche de la composition, une barrière en bois sépare le quai proprement dit de la cale, interrompue par un passage réservé aux manœuvres. C'est en ce lieu, légèrement à l'écart de l'agitation du bord de rivière, que prenaient place les promeneurs désireux de contempler le spectacle du port. L'expression «aller Chartronner» était d'ailleurs fréquemment utilisée par les Bordelais de l'époque. En raison de l'activité qui régnait en avant de la façade du quai, toutes les classes sociales se mélangeaient agréablement.
 
Détail : Portrait de famille © Musée des Beaux-Arts - BordeauxDerrière la balustrade, le spectateur peut apprécier cette foule bigarrée, qui vaque à ses occupations les plus diverses. Juste en arrière, Pierre Lacour nous offre un étonnant portrait de famille. À ce titre, la présence de la plupart de ses proches nous permet d'affirmer que ce tableau est également une œuvre testamentaire, dans laquelle l'artiste a voulu à la fois témoigner de son indéfectible attachement à la ville de Bordeaux et à son port, mais aussi et surtout son affection pour les siens.
Appuyé sur la balustrade, juste à l'angle de la descente vers la cale, Pierre Lacour, en redingote et haut de forme, dessine sur un carnet. Sa fille, Madeleine Aimée, une ombrelle à la main, vêtue d'une élégante robe de mousseline, caresse son chien, tout en contemplant attentivement le croquis de son père. À leur gauche, un jeune notable se penche au-dessus de la balustrade afin de déchiffrer la signature du tableau : «  P. Lacour Burdiga [Iensis] faciebat / An 1804, 5 et 6. » À la droite de Madeleine Aimée, un couple se dirige vers Lacour père. Il s'agit de l'architecte Louis Combes devisant avec sa fille Lysidice, qui épousera en 1813 Pierre Lacour fils.
  
Détail : Personnages premier plan © Musée des Beaux-Arts - BordeauxAu second plan, Madame Combes, se promène, au bras d'Anaïs, sœur cadette de Lysidice. Enfin, de l'autre côté, à gauche, accoudé à la balustrade, Pierre Lacour fils, les cheveux coupés « à la Titus », conformément à la mode de l'époque, observe les deux portefaix sur la cale. Derrière lui, son oncle, le peintre en miniature Antoine Lacour, coiffé d'un haut de forme, regarde le spectateur.
À l'écart de ce groupe, plus exactement à la gauche de Pierre Lacour père, deux personnages se détachent du reste de la foule. Le premier, vêtu d'une redingote qui met en valeur un léger embonpoint, déambule sur le quai, une fleur à la boutonnière. Il s'agirait du courtier maritime André Ferrière, dont le père Jean Ferrière, dit le catholique (1741-1813), fut un temps maire de Bordeaux. Sa présence n'est pas anodine. En exécutant ce tableau, Lacour entendait rendre hommage à toutes les catégories socioprofessionnelles à l'origine de la prospérité économique de la cité : les négociants étrangers, représentés ici par l'imposante masse architecturale de l'hôtel Fenwick, mais aussi les artisans, les marchands, les bateliers, figurent sur la toile. Les bureaux des navires marchands provenant d'Europe du nord, se trouvaient un peu plus loin sur le quai des Chartrons, à proximité du quai de Bacalan. Nous ignorons l'identité de la personne qui se trouve juste derrière Ferrière. Et pourtant, à sa mise élégante, il ne peut s'agir que d'une notabilité, qui, le journal sous le bras, promène son chien sur le quai. Il s'agit peut-être de Daniel Christoph Meyer, consul de Hambourg et familier de Lacour.
En dehors de la famille du peintre et de Ferrière, d'autres personnages tout aussi attachants arpentent la promenade. Quelques élégants juchés sur leurs montures, croisent de manière tout à fait naturelle des bouviers conduisant leur attelage vers la berge. Une femme portant une panière chargée de légumes sur la tête, regagne la promenade, tandis que deux nourrices coiffées à la cadichonne devisent entre elles, sans se soucier le moins du monde des deux garnements qui viennent d'échapper à leur vigilance. Le plus intrépide enjambe fièrement la balustrade, tandis que son compagnon de jeu tente, non sans mal, de lui maintenir la jambe. Plus loin, un adolescent retient son chien, à proximité de deux portefaix prenant un peu de repos, accoudés à la barrière. À leur droite, près des bornes de pierre, deux enfants, vêtus de beaux habits, accompagnés d'une femme en habit de deuil, déposent quelques pièces de monnaie dans le chapeau d'un infirme.
 
Détail : Ouvriers © Musée des Beaux-Arts - BordeauxLa balustrade de bois sépare les badauds et les promeneurs de l'activité proprement dite du port. Lors de son séjour à Bordeaux, en 1785, chez le consul Bethmann, Sophie de La Roche, qui contemplait depuis sa fenêtre, l'activité du quai des Chartrons s'étonnait du nombre considérable de « manœuvres, un millier environ », qui travaillaient sur la cale en pente douce. Dans les années 1804-1806, le va-et-vient continuel des corps de métiers, est toujours le même.
En avant de la balustrade sur laquelle Pierre Lacour dessine aux côtés de sa fille, des charpentiers de marine radoubent, sous un soleil de plomb, les coques de deux canots que l'on vient de remonter. Plusieurs ouvriers s'affairent autour de la première embarcation. L'un d'eux, de dos, maintient une planche de bois, que l'un de ses compagnons est en train de clouer. Près d'eux, un ouvrier surveille le goudron qui chauffe dans un chaudron et qui sera appliqué avec de l'étoupe pour calfater les joints. Près de la proue, une fillette et une femme, portant la coiffe à la cadichonne, récupèrent dans leurs tabliers des copeaux de bois. Non loin, deux charpentiers transportent un madrier, dont l'essentiel du poids repose sur un coussinet protégeant la nuque de l'un des deux hommes. Au second plan, juste derrière le canot en réparation, un portefaix décharge une cargaison de bois de merrain.
 

Détail : Quai © Musée des Beaux-Arts - BordeauxVers le quai des Chartrons, un charretier tente, à l’aide de quelques coups de fouets, de faire remonter son attelage chargé de pierres vers le haut de la cale, tandis que, plus en arrière, des barriques sont roulées sur le sol depuis une gabarre, puis tirées au moyen de cordes en direction des entrepôts. En arrière du bâtiment d'octroi, les ouvriers poursuivent les déchargements. Un agrandissement photographique du prolongement du quai des Chartrons permet d'apprécier le réalisme des scènes représentées. L'œil exercé peut repérer, çà et là, des personnages aux attitudes diverses et variées, circulant parmi les ballots de marchandises entreposés à même le quai, faute de place. Plus loin, se dresse la fontaine pyramidale de la rue Raze, qui servait à la fois de point d'eau pour les habitants des Chartrons mais aussi pour les vaisseaux en partance vers des terres lointaines.

Détail : Bateaux © Musée des Beaux-Arts - BordeauxLa plupart des voyageurs étrangers de passage à Bordeaux ont évoqué l'incessant va-et-vient de navires, gabarres, filadières et autres embarcations évoluant à proximité du port. Depuis sa fenêtre, plus exactement depuis son lit, Sophie de La Roche apercevait, en 1785, une forêt de mâts des navires [...], mouillés sur trois rangs et toujours à une certaine distance les uns des autres. Pareille disposition donne à l'ensemble un aspect d'autant plus magnifique et agréable que ces rangées de grands navires, aux mâts desquels flottent des pavillons si divers, éveillent vraiment en vous de grandes idées. » En 1788, le futur maréchal Brune faisait état de son étonnement, devant cette « forêt d'arbres fort élevés, dépouillés de leur verdure. Ce sont les mâts des vaisseaux des différentes nations qui commercent avec la capitale de la Guyenne. La variété des formes des bâtiments, les pavillons divers, l'activité des matelots sont, après la mer, ce qui m'a le plus étonné de ma vie. Hollandais, Anglais, Portugais, Génois, Français occupent tour à tour mes regards. Mille petits canots fendent les eaux à force de rames. »
Moins d'une vingtaine d'années plus tard, le spectacle reste le même, si ce n'est que les vaisseaux à fort tonnage sont moins nombreux. Et pourtant Johanna Schopenhauer soulignait que « mille embarcations aux formes variées se croisent sans arrêt sur le fleuve ».

Détail : Pavillons © Musée des Beaux-Arts - BordeauxConformément aux témoignages retranscrits ci-dessus, les navires à forts tonnages, battant pavillons étrangers, mouillent au large, sur trois rangs. Ils sont maintenus à une certaine distance les uns des autres, afin d'éviter, d'une part, tout risque d'avarie au moment des marées mais aussi, et surtout, tout incendie qui pourrait se propager trop rapidement. Non loin, quelques galiotes, dont les voiles carrées ont été ferlées sur les vergues, attendent de décharger. L'une d'entre elles, venant des Amériques, la proue dirigée vers l'aval du fleuve, fait face à un navire russe, reconnaissable à l'aigle impérial figurant sur le pavillon placé à la poupe. Plus loin, un brick, toutes voiles dehors quitte silencieusement le port...

 

Détail : Yole © Musée des Beaux-Arts - BordeauxUne flotte impressionnante navigue autour des grands voiliers. Parfois, de petits canots le plus souvent à avirons, assurent le transport des voyageurs depuis les vaisseaux vers la berge. Quelques bateaux à voiles glissent sur le fleuve. Des filadières, reconnaissables à leurs carènes effilées, s'apprêtent à quitter le bord. À droite, l'équipage d'une yole lormontaise guinde le mât et s'apprête à appareiller. Lorsque l'embarcation aura quitté la rive, un filet, ou  carrelet, sera immergé dans l'eau, afin de capturer les poissons de rivière. Plus au bord, des enfants profitent des joies de la baignade. Quelques barques, vidées de leur chargement sont échouées et attendent le changement de marée pour repartir. À l'aplomb des coteaux de Lormont, des navires à fort tirant d'eau attendent leur tour pour entrer dans la rade.

Par Cécile Navarra-Le Bihan. Extrait de Pierre Lacour : Le port de Bordeaux : Histoire d’un tableau. 2007. En vente à l’accueil

Ce tableau a bénéficié, en 2007, d'un méticuleux travail de restauration grâce au soutien du Crédit Agricole d’Aquitaine. Michèle Bruneau (atelier de restauration de bois dorés du musée) a pris en charge la dorure du cadre en chêne massif. De style Louis XVI, le profil de la moulure s’inspire d’un cadre existant. Il a nécessité la pose de 750 feuilles d’or 23 carats.

 

Eugène Delacroix, "La Grèce sur les ruines de Missolonghi"

$
0
0

(Saint-Maurice, 1798 – Paris, 1863)

La Grèce sur les ruines de Missolonghi

1826
Huile sur toile
Hauteur 213 cm, largeur 142 cm.
Achat au Salon de la Société des Amis des Arts de Bordeaux, 1852


Byron et la guerre d'indépendance grecque

           

Lord Byron en tenue ottoname 

Sous domination ottomane (turque) depuis le milieu du 15ème siècle, la Grèce se révolte en 1821. Si l'indépendance est proclamée dès 1822, lors de l'assemblée nationale d'Épidaure, les combats dureront en fait plus longtemps et il faudra attendre 1832 pour que soit créé officiellement le premier état grec.

En Europe, l’opinion publique se passionne pour le pays qui a vu naître la philosophie, les arts et la démocratie : dans chaque pays, le philhellénisme (« l'amour de la culture grecque») s'organise en comités chargés de réunir des fonds pour les insurgés. Le comité de Paris devient bientôt le plus efficace.
 
A l'aube du Romantisme, les écrivains comme Victor Hugo ou François-René de Chateaubriand, en France, et surtout Lord Byron en Angleterre prennent fait et cause pour les Grecs. Tempérament de feu, Byron s'engage personnellement dans le combat et se rend à Missolonghi en 1824. A l'entrée du golfe de Corinthe, la citadelle bâtie par les Vénitiens occupe une place stratégique qui lui vaut d'être une ville martyre assiégée sans répit par les Ottomans.         
 
Byron y débarque le 5 janvier pour combattre, mais usé par une vie d'excès, il y meurt d'une fièvre maligne le 19 avril 1824, à l'âge de trente-six ans. "La mort de Byron a été accueillie dans tout le continent par les signes d'une douleur universelle" (Victor Hugo). Dans la conscience européenne, le destin tragique du poète et la tragédie du peuple grec se confondent alors à Missolonghi.
 
Deux ans plus tard, dans la nuit du 22 au 23 avril 1826, Missolonghi, qui avait jusque là héroïquement résisté, tombe devant l'ennemi. Les survivants sont presque tous exterminés. C'est la Grèce elle-même qui meurt à Missolonghi! Sans doute le souvenir de Byron compte-t-il encore : la chute de la ville est perçue comme un affront fait à sa mémoire et à son engagement : " Frères, Missolonghi fumante nous réclame" (Victor Hugo, Les Têtes du Sérail, Les Orientales, 1826).
          

Delacroix, Byron et la Grèce

Dans toute l'Europe, et singulièrement en France, la jeune génération, avide de gloire et de combats, s’enflamme pour la cause grecque. Très vite, l’opinion publique incite les politiques à réagir. La France, l'Angleterre, bientôt la Russie s'entendront enfin pour obtenir du pouvoir ottoman qu'il accepte l'indépendance grecque.
 
Chef de file de la nouvelle génération, Eugène Delacroix fait sensation lorsqu'il expose, au Salon de 1824, les Massacres de Scio (Paris, musée du Louvre). Le tableau fait figure de manifeste : il signale l'engagement politique de l'artiste et révolutionne la peinture d'Histoire. En 1826, il renouvellera cette posture engagée avec La Grèce sur les ruines de Missolonghi.
 
Les Massacres de Scio, Eugène Delacroix, 1824.
 
Le Salon de 1824 marque en France la naissance du Romantisme. Depuis la fin de l'Empire (1815), les jeunes artistes cherchent un nouveau style et de nouveaux sujets pour exprimer leur sensibilité. La poésie de Byron est de celles où les peintres puisent volontiers : à plusieurs reprises Delacroix s'en inspirera (La Mort de Sardanapale en 1827, La barque de Don Juan en 1841). La mort de Byron, en 1824, consacre l'enthousiasme de la nouvelle génération pour le poète maudit.
 

Delacroix et l’histoire grecque

 
Delacroix perçoit dans la Grèce et ses révoltes un sujet saisissant et moderne. Mais quelles sont ses motivations réelles ? Le peintre n'a pas encore voyagé à cette date. La Grèce dont il s'inspire est pour lui un lointain d'invention, nourri surtout par ses lectures. En même temps, le peintre est obsédé par l'idée de représenter l'histoire de son temps.
 
Les Massacres de Scio représentent un événement précis d'une grande violence, les exactions perpétrées sur les habitants de l’île de Scio (ou Chios) en avril 1822. Le parti pris est provocateur, d'un réalisme sanglant. Le succès est considérable. Pour la première fois, on l’oppose au classicisme de David ; on le qualifie de « romantique », mot nouveau alors,  tout en soulignant le manque de noblesse du sujet traité.
 
Dans les années suivantes, le peintre multipliera les tableaux de sujets orientalistes qui mettent en valeur sa palette aux tons vifs et sont évocateurs, pour le public, d'un exotisme contrasté.
 

La Grèce sur les ruines de Missolonghi

Malgré son sujet orientaliste, La Grèce sur les ruines de Missolonghi est d'un tout autre esprit. L'initiative est d'abord très politique : c'est le comité philhellène de Paris qui organise l'exposition du tableau à Paris, dans la galerie du marchand Lebrun. Elle est payante et les gains perçus doivent revenir au comité pour soutenir les insurgés grecs.
Plutôt que de représenter des moments réels de cette histoire récente (les préparatifs pour le siège, les derniers résistants se sacrifiant) comme il l'avait fait précédemment, Delacroix choisit une figure de style : l’allégorie. Le choix de l'allégorie est audacieux : en 1826, le genre paraît dépassé et Delacroix lui-même ne s'y est guère intéressé jusque là. Mais l'ambition qu'il se donne ici est différente : il s'agit de dépasser le caractère d’actualité de l’événement contemporain pour proposer une réflexion sur le sens de l’histoire.
Une jeune femme vêtue du costume national, debout sur un bloc de pierre ensanglanté, s’offre au regard, telle une vierge antique promise au sacrifice. Elle incarne la Grèce. Une tête coupée posée sur la muraille, des tâches de sang, une main qui sort des ruines sont les seuls détails violents que s'autorise Delacroix.
La femme n’est pas agitée de gestes violents de malédiction ou d’effroi, comme le peintre l’avait imaginé dans ses premiers croquis : poitrine découverte et bras ouverts, presque agenouillée sur les ruines de la ville martyre, elle semble accepter le sacrifice qui lui est imposé, vivante condamnation de la violence qui s'est abattue sur la Grèce en révolte. Peut-on y voir le symbole triomphant de la prochaine résurrection de la nation grecque ? A la date où Delacroix peint son tableau, le succès des insurgés est incertain.
Quatre ans plus tard, Delacroix aura recours à nouveau à l'allégorie, avec son tableau le plus célèbre, La Liberté guidant le peuple (Paris, musée du Louvre).
 

Delacroix à  Bordeaux

L’acquisition de ce tableau par la ville de Bordeaux en 1852 n’est pas un hasard. Delacroix y a des attaches familiales et sentimentales très fortes. Son père, Charles Delacroix,  s'y est installé en 1803, pour y mourir en 1805. Le jeune Eugène quitte alors la ville à sept ans. Il n'y reviendra que quarante ans plus tard, à l'occasion du décès de son frère aîné, le général Charles-Henri Delacroix, enterré avec son père au cimetière de la Chartreuse, dans une sépulture commandée à l’architecte bordelais Louis Roché.
 
 
« Tous mes souvenirs me rattachent à Bordeaux comme à ma ville natale » mentionne t-il dans une lettre au maire. Même s’il ne revient plus à Bordeaux après 1845, il garde toujours pour la ville une affection particulière qui l’incite à proposer ses tableaux pour les expositions annuelles du Salon des Amis des Arts, entre 1851 et 1863 : quarante-huit œuvres de Delacroix y seront exposées, plus que dans n’importe quelle ville de province.
 
Son amitié indéfectible pour le peintre bordelais Adrien Dauzats n'est sans doute pas étrangère à sa présence régulière aux Salons de Bordeaux. C'est par son entremise en effet que Delacroix envoie trois toiles au Salon de 1851, dont la Grèce sur les ruines de Missolonghi. A l'issue du Salon, le tableau est acheté par la municipalité pour le prix de 2 500 francs. Peint vingt-quatre ans plus tôt, il continue de susciter les débats. Entretemps, la Grèce s'est libérée.
 
Le musée compte aujourd'hui sept œuvres de Delacroix. La Grèce sur les ruines de Missolonghi est sans doute le tableau le plus célèbre du musée des Beaux-Arts de Bordeaux. Grand admirateur de Delacroix, Odilon Redon en a réalisé une copie conservée, elle aussi, au musée.
 
A voir
Exposition du Musée des Beaux-Arts de Bordeaux organisée dans le cadre du 13e Mai musical et présentée à la Galerie des Beaux-Arts du 17 mai au 30 septembre 1963.

Dates principales de la vie d’Eugène Delacroix 

1798 - Delacroix naît à Charenton-Saint-Maurice le 26 avril
1803 - Charles Delacroix, son père, préfet de Bordeaux
1805 - Charles Delacroix meurt à Bordeaux
1814 - A 16 ans, le jeune Eugène Delacroix est orphelin
1822 - Premier succès avec Dante et Virgile aux enfers
1824 - Il expose les Massacres de Scio, soutenu par Théophile Gauthier
1825 - Il passe trois mois en Angleterre où il étudie les toiles du peintre Constable
1831 – Il est nommé chevalier de la légion d’honneur
1832 - Delacroix quitte Paris pour le Maroc et l'Algérie
1840 - Il participe à la décoration du Palais du Luxembourg pendant 6 ans
1857 - Après vingt ans d'attentes, il est élu à l'Institut (rédaction du Dictionnaire des Beaux-Arts)
1855 - 42 de ses œuvres sont regroupées à l'Exposition Universelle de Paris
1863 - Il meurt d'une longue maladie le 13 juin

Bibliographie sélective, à consulter à la bibliothèque du musée :

Delacroix, De l’idée à l’expression (1798 – 1863), Editions Obra Social « la Caixa », 2011.
La Grèce en Révolte, Delacroix et les peintres français, 1815-1848, Editions de la RMN Paris, 1996.
Delacroix, La naissance d’un nouveau romantisme, Editions de la RMN, Paris, 1998.
Delacroix et le romantisme français, Le Musée National d’art Occidental Tokyo et le Tokyo Shimbun,  Tokyo, 1990.     
Art et Bourgeoisie : la Société des Amis des Arts de Bordeaux (1851-1939), Dominique Dussol, préface de Bruno Foucart, éditions Le Festin 1997.

 

Eugène Delacroix, "La Chasse aux lions"

$
0
0

(Saint-Maurice, 1798 – Paris, 1863)

La Chasse aux lions

1854-1855
Huile sur toile.
Signé et daté en bas au centre : EUG. DELACROIX 1855
Hauteur sans cadre, 175 cm ; largeur sans cadre, 360 cm
Dépôt de l'Etat, 1856.
Collection du musée des Beaux-Arts, par transfert de propriété des oeuvres de l'Etat déposées à Bordeaux avant 1910, 2012.

La France de Napoléon III organisa sa première Exposition universelle des produits de l’industrie sur les Champs-Elysées ; elle souhaitait ainsi répondre au succès de celle organisée à Londres en 1851. La commission impériale répartit les « produits » entre deux sections distinctes : les produits de l’industrie et les cinq mille œuvres d’art retenues par un « jury mixte international ». A côté des écoles allemande, anglaise, belge, hollandaise, italienne ou suisse, la France occupait plus de la moitié du palais des Beaux-Arts situé entre la rue Marbeuf et l’avenue Montaigne. S’affirmant ainsi aux yeux du monde comme la nouvelle patrie des arts, l’Etat demanda alors aux gloires de son école - Ingres, Delacroix, Decamps et Vernet - de venir présenter leurs chefs-d’œuvre dans deux salons situés au centre de l’édifice. Seuls, les deux premiers peintres, supposés rivaux par l’opinion publique et les organisateurs, jouissaient chacun d’une salle entière, quoique Delacroix dut partager la sienne avec quelques confrères moins prestigieux.

Alors au faîte d’une carrière émaillée de scandales et de critiques véhémentes, Eugène Delacroix sélectionna trente-cinq toiles qui retraçaient trente-trois ans d’activité depuis La Barque de Dante (Salon de 1822, Paris musée du Louvre) jusqu’à la dernière commande de l’Etat passée un an plus tôt : La Chasse aux lions. Pour l’occasion, il « emprunta » quelques-unes d’entre elles à des musées et à des amis qui les possédaient. En revanche, la Chasse aux lions constituait une nouveauté pour laquelle l’Etat avait libre choix du thème à son auteur. Ce dernier avait sans doute murement réfléchi à son projet et, comme le laisse supposer son Journal, en avait négocié le thème en amont avec l’administration.

Delacroix s’intéressait à la représentation animalière depuis la fin des années 1840 et se rendait souvent au Jardin des plantes en compagnie du sculpteur Barye. Mais, il gardait à l’esprit les œuvres de son plus illustre prédécesseur : Pierre Paul Rubens (1577-1640). « Cabinet d’histoire naturelle, public les mardi et vendredi. Eléphants, rhinocéros, hippopotames, animaux étranges ! Rubens l’a rendu à merveille » (Journal, 19 janvier 1847).

Il est de tradition d’écrire que le peintre s’inspira de la Chasse aux lions du maître flamand que le musée de Bordeaux possédait depuis 1805. Il pouvait certes, sans revenir à Bordeaux, étudier l’œuvre à partir de la gravure de Soutman, mais nous savons, par une lettre, qu’il la trouvait inférieure à La Chasse à l’hippopotame de Munich. Un dessin du Louvre, daté de 1845, montre que Delacroix travaillait ce thème cynégétique à partir de la Chasse aux lions (v. 1621, Munich, Alte Pinacothek) dont le musée parisien possédait une copie dessinée pour la gravure de Schelte a Bolswert, mais aussi à partir des combats de l’Italien Antonio Tempesta (155-1630).

Entre avril et la fin de juillet, Delacroix composa sa scène à partir de nombreux dessins préparatoires, pour les groupes et la composition d’ensemble, et d’esquisses peintes, passant de masses colorées tournoyantes (Paris, musée d’Orsay) à une scène plus aboutie (Stockholm, Nationalmuseum) destinée au jury. Ce travail préparatoire, élaboré à partir du centre de la toile, permettait le passage de la demi-teinte au ton voulu pour donner un équilibre entre la spontanéité de l’esquisse, l’agencement chromatique et la lisibilité de la scène. A partir de l’œuvre de Rubens, Delacroix déconstruisit la composition originelle, qu’il trouvait trop désordonnée, afin de reconstruire et réarticuler les figures pour plus de lisibilité. L’imbrication des différents groupes et le mouvement violent des corps tournoyants constituent le sujet et l’originalité du tableau.

Le Journal indique précisément le début de la réalisation définitive, le 30 juillet, et témoigne de la remise en cause incessante de ses choix chromatiques. Malgré un effort soutenu, Delacroix n’acheva son œuvre que quelques jours avant l’ouverture de l’exposition le 15 mai.

Lorsque l’œuvre fut présentée, elle surprit tout le monde, par la violence du sujet et la vigueur de sa réalisation, et par l’éclat et la vigueur de sa palette : « La Chasse aux lions est une véritable explosion de couleur (que ce mot soit pris dans le bon sens). Jamais couleurs plus belles, plus intenses, ne pénètrent jusqu’à l’âme par le canal des yeux » écrivit Baudelaire dans un article du Pays le 3 juin 1855. De son côté, Paul Mantz critiqua la composition : « Seul le paysage est superbe ».

Quelques mois plus tard, l’Etat déposait l’œuvre au Musée de peinture et de sculpture de Bordeaux installé dans l’hôtel de ville, comme « pendant » de la Chasse de Rubens. Les visiteurs remarquaient l’entassement et la mauvaise visibilité de la collections dans les salons du rez-de-chaussée et dans les salles qu’occupait la Faculté depuis les années 1830. Un premier incendie se produisit dans l’édifice en 1862 et endommagea quelques œuvres. L’essentiel fut cependant préservé et gagna alors un « local en planches » (une galerie), au centre du jardin de l’hôtel de ville, pendant les travaux de réfection. Devant la dégradation des peintures, le conservateur décida de les rapatrier dans les salons dans l’attente du projet d’un nouveau musée. Par une fatalité déconcertante, un second incendie se déclara le 7 décembre 1870 et détruisit ou endommagea gravement trente-et-un tableaux, dont une majorité de grands formats, et endommagea quarante-sept autres. La Chasse de Rubens compta parmi les victimes du sinistre et celle de Delacroix subit des dégâts irrémédiables au point qu’elle resta dans un « magasin » municipal. Etant donné sa connaissance des techniques de son maître Delacroix, Andrieu proposa ses services pour la restauration dès 1871. Au terme de sept ans de consultation, il fut décidé de restaurer l’œuvre en l’état mais de la laisser en réserve. Entretemps, la Ville décida la construction d’un musée d’après les plans de son architecte Charles Burguet entre 1875 et 1881.

Cette toile reste capitale dans la carrière de Delacroix car, comme l’a rappelé Vincent Pommarède dans le catalogue Delacroix les dernières années, elle synthétise trois thèmes majeurs du peintre (orientalisme, chasse et représentation animalière) et résume ses principales préoccupations sur le mouvement, l’expression, la couleur et la technique. Le peintre s’était déjà essayé à ce sujet en réalisant en 1854 La Chasse au tigre (Paris, musée d’Orsay) commandée alors par le marchand Weill. Dans sa volonté de renouveler un sujet déjà traité, Delacroix peignit en 1858 une seconde version (Boston, Museum of Fine Arts) où il sépare les protagonistes dans un souci de clarté et en 1861 une dernière version (Chicago, Art Institute) plus nerveuse et au paysage plus prépondérant.

En choisissant un sujet traité par ses prédécesseurs flamands et italiens des XVIe et XVIIe siècles, mais aussi par des peintres français du XVIIIe siècle (Boucher, Oudry), Delacroix s’inscrivait dans une thématique fréquemment abordé. Mais en se mesurant à Rubens, il montre aussi sa propre perception de son rôle, sinon de sa place dans le panthéon des grands maîtres de la peinture européenne. Tout au long de sa carrière, Delacroix n’a eu de cesse de se mesurer aussi à ses illustres prédécesseurs (Léonard de Vinci, Raphaël, Rubens et Le Brun) et, par un curieux paradoxe, les ravages du feu ont renforcé les effets plastiques et dramatiques de cette œuvre.

La Chasse aux lions fut la dernière grande composition de Delacroix présentée au public. Dans son désir permanent de se renouveler, le peintre s’intéressa encore à cette représentation cynégétique en 1858 (Boston) et 1861 (Chicago). Malgré les nombreuses critiques, elle bénéficia rapidement d’une renommée auprès des amateurs et des artistes qui venaient l’étudier et la copier au musée de Bordeaux. Parmi eux, figurèrent Andrieu, le paysagiste Daubigny, le jeune Odilon Redon (1867, musée d’Orsay, dépôt au musée des Beaux-Arts de Bordeaux et Winterthur, Kunstmuseum) ou, moins connus, J. Coudray (Bordeaux, musée des Beaux-Arts) et le baron de Gervain (idem). Malgré le sinistre, elle continua à inspirer certains contemporains à l’instar d’un Charles Dufresne (vers 1929, Musée national d'art moderne, Paris, déposé au musée des Beaux-Arts de Bordeaux).

Rinaldo CARNIELO, "Mozart expirant"

$
0
0

(Boscomontello-Biadone, 1853 – Florence, 1910)

Mozart expirant

1877-1880
Ronde-bosse en marbre
Hauteur 150cm, largeur  93cm, profondeur 150cm
Dépôt de l’Etat en 1890.

 
Un homme jeune, barbu et décharné, à demi-allongé dans un fauteuil, la tête appuyée sur un coussin, est sur le point de rendre l’âme. Il est vêtu d'une chemise à volants, une couverture de laine enveloppe ses jambes et son pied droit repose sur un autre coussin. La main gauche posée sur une partition de musique, il a la tête tournée sur le côté et rejetée en arrière. Ses yeux sont mi-clos et sa bouche, légèrement entrouverte, découvre ses dents.
 
Ce qui caractérise cette sculpture, c’est l’extrême précision du rendu des détails : aspect pelucheux de la couverture de laine, damassé du coussin sur lequel repose la tête de Mozart ou notes de sa partition du Requiem. Carnielo parvient à suggérer dans un matériau aussi rigide que le marbre le moelleux du coussin. Il compose sa sculpture avec rigueur en contenant les diagonales du corps du mourant dans un fauteuil aux lignes horizontales et verticales. Se situant dans la tradition de la sculpture funéraire italienne, il représente les derniers instants du compositeur Wolfgang Amadeus Mozart (Salzbourg, 1756 – Vienne, 1791).
 
D’après les recherches menées par Evelyne Helbronner dans son Catalogue raisonné des sculptures du XIXème siècle des Musées de Bordeaux (Thèse de doctorat, Paris IV, 2003), Carnielo eut du mal à obtenir l’envoi de son œuvre à l'Exposition Universelle de Paris de 1878. En effet, le délégué du gouvernement italien l’écarta, trouvant « le sujet trop lugubre ». L’artiste dut alors se tourner vers Paris qui accepta de la présenter. Le plâtre fut acheté 12.000 francs par le gouvernement français afin d’être exécuté en marbre. La sculpture devait être exposée au Conservatoire national de musique. Livrée en 1880, elle ne put être y installée car les travaux d’embellissement n’étaient pas achevés, situation qui dura encore dix ans. Après avoir été proposée à Toulouse, elle fut finalement attribuée au musée des Beaux-Arts de Bordeaux où elle fut envoyée en 1890. A Bordeaux, on renonça à la présenter au Grand Théâtre, « lieu de fête et de plaisir » et elle fut finalement déposée au musée.
 
Issu d’une famille modeste, Carnielo fut élève de l’Institut Technique et de l’Ecole de dessin pratique de Padoue puis il suivit l’enseignement de Costoli à l’Académie des Beaux-Arts en 1870 à Florence. Après des débuts difficiles, il y obtint un atelier. Il commença à exposer à Rome en 1883. Même s’il a produit de petites figures animales, des statuettes aimables sur le thème de l’amour et des objets d’art décoratif, un de ses thèmes de prédilection est la représentation du tragique et du macabre, amorcé par son Mozart mourant ; cette voie, l’artiste la poursuivra avec L’Ange de la mort pour le tombeau du prince Woronzoff au cimetière de Montmartre.
 
Ce thème fut exploré par des sculpteurs contemporains de Carnielo comme Henri Allouard qui réalisa en 1882 un Molière mourant ou Pierre-Joseph Rambaud un Berlioz mourant en 1892. Il convient d’ailleurs de rappeler que la sculpture funéraire a toujours occupé une place importante dans les commandes passées aux sculpteurs.  Il s’agissait en effet d’orner les tombeaux des grands de ce monde par des portraits ou des allégories – la référence majeure dans ce domaine demeurant les réalisations de Michel-Ange pour les tombeaux des Médicis. Pour Mozart, le cas est différent puisqu’il s’agit de pérenniser dans la pierre le passage de vie à trépas d’un artiste, en l’occurrence un musicien. Ce goût de la mort relève plus du spleen que traduisent à la fin du XIXème siècle les  écrivains comme Baudelaire, les  peintres symbolistes comme Gustave Moreau, les sculpteurs comme Rodin et sa Porte de l’Enfer ou Camille Claudel et sa Clotho.
 
Il peut être également intéressant de comparer cette sculpture de Carnielo avec un autre dépôt de l’Etat envoyé la même année (1890) au musée des Beaux-Arts, Lutinerie de Henri Allouard qui est son exact opposé puisqu’elle représente une bacchante allongée se faisant lutiner par un petit satyre. En cette fin de siècle, la sculpture académique aborde tous les sujets, qu’il s’agisse de l’évocation de la finitude humaine ou celle de la vie et des plaisirs de l’amour.

 


Antoine-Louis BARYE, "Panthère saisissant un cerf"

$
0
0

Paris, 1796-1875

Panthère saisissant un cerf

Achat de la ville en 1857

Bronze à patine brune

Panthère saisissant un cerf © Musée des Beaux-Arts-mairie de Bordeaux. Cliché F.Deval
 
 
Dans son groupe animalier, Barye met en scène un combat bien inégal entre un cerf et une panthère qu’il traduit par des lignes mouvementées. La grande diagonale du fauve se jetant sur sa proie, les courbes et contre-courbes du cerf qui tente de résister à cet assaut situent cette œuvre dans son époque, celle du romantisme, avec son goût pour le mouvement, le paroxysme et la violence. Pourtant, ce sculpteur, surnommé le « Michel-Ange de la Ménagerie» (L’Illustration, 19 mai 1866, p.315) par Théophile Gautier (1811-1872), rend avec exactitude, par un ciselage précis des surfaces, les détails de l’anatomie et des pelages.
 
Fils d’un orfèvre parisien, Antoine-Louis Barye fut placé très tôt chez Fourier, un graveur sur acier qui fabriquait des matrices pour les parties métalliques des uniformes de la Grande Armée. Initié à toutes les techniques du traitement du métal, il devint un ciseleur hors pair. Il entra ensuite à l’École des Beaux-Arts de Paris en 1818 et se forma dans l’atelier du sculpteur académique François Joseph Bosio (1768-1845) et, parallèlement, dans celui du peintre Antoine-Jean Gros (1771-1835), l’un des premiers peintres romantiques. La réaction du Salon à ses premiers envois le déçut et l’obligea à entrer chez l’orfèvre Fauconnier chez lequel il exécuta des objets décoratifs et des figurines d’animaux. Durant cette période, il compléta aussi ses connaissances en étudiant les ouvrages scientifiques de Cuvier et en fréquentant assidûment avec Eugène Delacroix le Jardin des Plantes à Paris et le laboratoire d’anatomie pour dessiner les animaux. Il se fit connaître du public en exposant le Tigre dévorant un gavial au Salon de 1831 et  le Lion au serpent à celui de 1833, ce qui lui valut le soutien du duc d’Orléans ainsi qu’une importante commande, malheureusement interrompue par la mort accidentelle du duc.
 
Refusé à plusieurs reprises au Salon, il décida de ne plus y participer et d’entreprendre une carrière en marge des milieux officiels en créant sa propre fonderie afin d’y éditer lui-même ses bronzes. La Révolution de 1848 le ruina mais dès 1850 il fit son retour au Salon avec deux œuvres qui furent très admirées et lui valurent des commandes de l’Etat, des emplois officiels et une belle fin de carrière.
 
Le musée des Beaux-Arts de Bordeaux a la chance de posséder cinq bronzes de Barye : trois figures, Le roi Charles VII de 1836, Thésée combattant le Minotaure de 1843 et Guerrier tartare arrêtant son cheval de 1845 ainsi que deux groupes animaliers, la Panthère de 1857 et Tigre et antilope de 1862. Le goût pour la représentation animalière chez Barye l’amène toujours à associer un animal quand il traite une figure humaine.
 
La place de Barye dans la sculpture du 19ème siècle est très importante. En effet, il a su créer des thèmes nouveaux : au moment où seule la figure humaine était jugée digne d’être sculptée, il a donné une vraie place à l’art animalier.  Il a fait la promotion de la technique du bronze, alors que ses contemporains utilisaient davantage la pierre ou le marbre. Il a également imposé ses formats, souvent de petite taille, à une époque où on privilégiait la sculpture monumentale. Il a ainsi su donner leurs lettres de noblesse aux arts décoratifs.

Jean Louis Ernest MEISSONIER, "Cheval au trot"

$
0
0

(Lyon, 21 février 1815 – Paris, 31 janvier 1891)

Cheval au trot

Bronze fondu d’un seul jet avec patine par oxydation

40 x 60 cm

Fondeur – éditeur : Siot-Decauville, n°1.

 

Ce Cheval au trot, la crinière au vent, montre l’intérêt du peintre pour la reproduction la plus exacte possible des allures équestres. Bien avant les travaux scientifiques de Jules Marey (1830-1904), l’inventeur du fusil photographique qui permet de photographier un être sur douze poses, et bien avant la publication des œuvres du photographe Eadweard Muybridge (1830-1904), à partir d’octobre 1878, dans la presse française, Ernest Meissonier chercha à saisir le mouvement de l’animal dans  sa réalité et non plus dans son apparence, telle qu’elle pouvait être perçue par l’œil humain.
 
            Médaillé à plusieurs reprises au Salon, Meissonier est surtout connu de ses contemporains grâce à sa peinture. Le public ne découvrit l’ensemble de ses œuvres sculptées qu’après sa mort, en 1893, à l’occasion de deux expositions posthumes : l’une à la galerie Georges Petit où figuraient onze cires et l’autre à l’Ecole des Beaux-Arts où n’étaient exposés que des bronzes. En 1894, la fonderie Siot-Decauville, avec l’aide de Georges Petit (1856-1920), commença à faire fondre en bronze d’un seul jet, avec des patines réalisées par oxydation, les cires que lui avait confiées le fils de l’artiste, Charles Meissonier.  Ces éditions figurèrent à Bordeaux lors de l’Exposition philomathique de 1895. A cette occasion, la ville de Bordeaux acheta quatre bronzes : Le Cuirassier, Napoléon 1er en 1814, le Voyageur et le Cheval au trot.
 
            L’exactitude des détails des scènes figurées était le souci majeur de Meissonier. Il multipliait les études, tant dessinées que peintes, mais aussi sous forme de statuettes de cire. Celles-ci l’aidaient à construire et à composer ses œuvres peintes. Rien n’est laissé au hasard d’une impression. En effet, chacun des éléments qui se retrouvaient sur ses toiles avait été l’objet au préalable d’une étude spécifique. Ainsi, le Cheval au trot fut modelé pour la peinture 1807, Friedland, présentée à Paris au Salon des Artistes Français de 1875 et conservée aujourd’hui au Metropolitan Museum of Art de New York.
 
            L’historien d’art Léonce Bénédite (1856-1925) relate que Meissonier, dans ce désir de réalisme, « s’était fait établir, par réduction mathématique, un petit squelette de cheval parfait. […] Ces petits squelettes articulés servaient d’armature aux maquettes en cire qu’il se plaisait à faire. […] Il y prit un certain goût pour la sculpture et a exécuté quelques morceaux qui montrent ce dont il est capable. » [1]. Nous en avons un exemple ici, d’autant plus remarquable que tout ce travail préparatoire n’apparaît pas et ne nuit donc pas à la spontanéité de l’exécution. Du même coup, Meissonier rejoint les meilleurs animaliers de son temps qui, pour la première fois, ont su exprimer le caractère profond de l’animal représenté au lieu de le transformer en concept décoratif. L’aspect authentique est renforcé par l’absence de piédestal ; l’œuvre n’est plus isolée dans un monde fictif mais s’insère dans la vie quotidienne. C’est ce que voudra Rodin pour son groupe des Bourgeois de Calais (1895, musée Rodin, Paris).[2]

 

 

 

 

 



[1] D’après les recherches menées par Evelyne Helbronner (thèse de doctorat, Paris IV, 2003).

[2] Catalogue de la sculpture française de 1850 à 1914 dans les musées et collections publiques du nord de la France.

 

 

Auguste Rodin (1840-1917)

$
0
0

Image : Cybèle d'Auguste Rodin. Bordeaux, musée des Beaux-Arts. Photo L Gauthier

Cybèle

1904
Plâtre
Achat de la Ville de Bordeaux à l'occasion du Salon de la Société des Amis des Arts de Bordeaux en 1906, présentée à l'époque sous le titre Figure assise
Hauteur 166 cm
Largeur 80 cm
Profondeur 94 cm

En 1883, Auguste Rodin participe au Salon de la Société des Amis des Arts de Bordeaux. L'exposition organisée sur les Terrasses du Jardin-Public est, comme chaque année depuis 1851, l'événement artistique majeur de la Ville. 

Il faudra attendre vingt-trois ans pour retrouver une œuvre de Rodin à Bordeaux. Mais en 1906, cette seconde participation se solde par l’achat de la municipalité du grand plâtre, inscrit au catalogue de l’exposition sous le numéro 542, Figure assiseC’est un succès, mais un succès acquis à moindres frais si l’on compare la dépense de 500 frs pour l’œuvre de Rodin à celle de 8000 frs pour Jeunesse en rose, tableau d’Alfred Roll. Cette acquisition reste toutefois une exception et place Bordeaux dans les premières villes à faire l’acquisition d’une œuvre d’Auguste Rodin pour son musée. (Cybèle : en savoir +…)

À l'image des salons parisiens, l'exposition de la Société des Amis des Arts de Bordeaux présente "les ouvrages de peinture, sculpture, architecture, gravure et lithographie des artistes vivants". Mais, malgré une volonté de présenter les productions artistiques les plus diverses, la peinture garde une place de premier choix et relègue les autres domaines, comme la sculpture, au deuxième rang de la manifestation, conformément au goût du public. L'occasion toutefois, pour les artistes locaux, de rencontrer les œuvres et les créateurs de plus grande renommée. 

La présence de Rodin à Bordeaux permet aux sculpteurs de découvrir l’artiste à l’origine de tant de controverses. De L’Âge d’airain, en 1877, où on l’accuse de moulage sur le motif, à son Victor Hugo, en 1896, représenté nu, ou encore en 1898, son Balzac bouleversant les représentations classiques des « grands hommes », Auguste Rodin incompris, déchaîne la critique. Par contestation, il organise à Paris, à l’écart de l’Exposition Universelle de 1900, une présentation de 150 de ses sculptures. Le succès est immédiat et les commandes affluent. Pour faire face à la demande, Rodin doit trouver de l'aide pour réaliser une partie de son travail. Il fait appel à ses élèves (Camille Claudel) et à quelques sculpteurs dont il reconnaît les compétences, dont la « Bande à Schnegg ». (Bande à Schnegg : en savoir +…)

Vue de Cybèle, dans les salles de l'aile nord du musée des Beaux-Arts de Bordeaux
Ci-dessus : Cybèle, dans les salles du musée des Beaux-Arts de Bordeaux, 2016


 

Albert MARQUET "Portrait de Matisse "

$
0
0

(Bordeaux, 26/03/1875- Paris, 14/06/1947)

"Portrait de Matisse "

Huile sur toile, hauteur sans cadre 61cm, largeur sans cadre 50cm.

Historique : Achat de la ville 2011.

Ce Portrait d’Henri Matisse par Albert Marquet appartient à cette période où les deux artistes travaillaient ensemble, scellant ainsi un moment fort de leur amitié.
Cette période de travail en commun date de leur apprentissage à l’Ecole nationale supérieure des Beaux-Arts dans l’atelier de Gustave Moreau, dans les années 1896-1898 et se prolonge dans les années 1903-1904, pour laisser place à une amitié indéfectible, comme on en connaît peu entre deux artistes et dont leur correspondance fait foi.

Le musée des Beaux-Arts de Bordeaux dont la collection d’œuvres de Marquet, originaire de Bordeaux, est l’un des points forts de son XXème siècle, conserve le témoignage de ce travail à travers le Nu dit Nu fauve de 1899 ainsi qu’à travers les œuvres de Matisse de la collection de Marquet mise en dépôt par le MNAM.
La présence de ce Portrait de Matisse dans les collections du musée de Bordeaux renforce ce moment historique dans l’histoire de la peinture qui donnera naissance au fauvisme.

Lors de l’exposition d’été « Matisse-Marquet. Correspondances », en 2009 ce portrait a été une révélation par l’évidence de sa modernité, dans cette économie de moyen grâce à laquelle Marquet annonce la stature de son ami.

Mary CASSATT, "Portrait de fillette"

$
0
0

(Allegheny City, 1844- Mesnil-Théribus (Oise), 1926)

Portrait de fillette ou La robe de dentelle

Huile sur toile, 1879.

Historique : Ancienne collection René DOMERGUE.

Pour ce portrait typiquement impressionniste, l’artiste représente de face, aux deux tiers de sa hauteur, une fillette qui doit avoir deux ou trois ans. La petite fille blonde regarde devant elle, les yeux perdus dans le vague, figé dans l’attente de la pose. Sa robe d’été sans manche est blanche, sa tête est couverte par un chapeau assorti et surmonté d’une fleur. L’ensemble vaporeux est peu détaillé, mais laisse apercevoir une rangée de dentelle constituant le col de la robe. L’arrière plan sans perspective n’est même pas esquissé : un simple fond jaune pâle à larges touches complète l’harmonie colorée entre la blondeur et la pâleur du petit visage aux yeux cernés. Les deux bras blancs de la fillette sont posés sagement sur son ventre, sa main gauche attrapant son poignet droit. La composition épurée est débarrassée des détails qui ne sont pas essentiels au portrait et la palette de couleur reste limitée à quelques tonalités lumineuses.
 
Dans ce portrait délicat, on reconnaît sans doute la petite Odile Fèvre, une nièce du peintre Egdar Degas, grand ami de Mary Cassatt. Plusieurs spécialistes s’accordent à dire qu’on reconnaît là l’enfant déjà présente dans Woman and child driving (Musée de Philadelphie), où le peintre représentait l’attelage familial tiré par le poney « Bichette » lors d’une promenade au Bois de Boulogne en 1879. La fillette est reconnaissable à son aspect sérieux et concentré, et à ses mêmes yeux sombres un peu tombants.
 
Etroitement liée à l’histoire du mouvement impressionniste, la carrière de Mary Cassatt se déroule en majorité en France, sa patrie d’élection. A Paris elle fréquente l’atelier Chaplin, comme le souhaitait sa famille. Mais Degas qui avait remarqué ses envois toujours appréciés au Salon, l’invite à exposer avec les Impressionnistes dès 1877. Dès lors elle participe à leurs expositions et se révèle avec Berthe Morisot comme la meilleure représentante féminine de ce mouvement.
 
Au contraire de certaines œuvres comme « Little girl in a blue armchair », l’absence de décor et d’analyse psychologique évidente annoncent les portraits plus tardifs. A partir de 1901, Mary Cassatt commence une série de pastels représentant de petites filles posant seules, se détachant sur un fond uniforme. Ces portraits étaient particulièrement appréciés des collectionneurs et elle en produisit un grand nombre. Aussi ce Portrait de fillette est-il typique des modèles qu’elle affectionne : un visage rond, des yeux larges, un petit nez, une bouche arrondie. Ces compositions ne dépeignent jamais l’énergie et excitation de l’enfance. Au contraire le peintre leur préfère toujours des scènes de calme et d’inactivité.
 
Libre et indépendante, gardant toujours un style qui lui est propre, Mary Cassatt peignit essentiellement des enfants ou des mères avec leur enfant. Le portrait bordelais est donc tout à fait typique de cette petite enfance, ingénue et sage, qui fascinait tant l’artiste.

 

 

 

Viewing all 2983 articles
Browse latest View live